
Après plusieurs mois de suspense et de polémique, l’association de lutte contre la corruption Anticor a obtenu le sésame pour continuer à exister. Vendredi 2 avril, le Premier ministre a accepté de reconduire son agrément. Entretien avec la présidente de l’association, Élise Van Beneden, qui dénonce une campagne de destabilisation.
(...) Cela fait des mois que nous sommes sur le pont, qu’on se bat pour cet agrément et cela n’a pas été simple. Mais ce n’est pas tout à fait fini. Nous avons toujours une épée de Damoclès, puisque dans son arrêté, Matignon dit nous avoir accordé l’agrément avec des réserves… Il indique que nous avons pris l’engagement de mandater un commissaire aux comptes, mais nous en avons déjà un ! Nous allons changer nos statuts certes, mais le décret demande un fonctionnement conforme aux statuts, pas des dispositions particulières dans les statuts… Matignon mentionne également attendre l’issue d’une procédure d’anciens administrateurs contre Anticor mais nous leur avons indiqué les fondements juridiques de leur demande, qui sont inconsistants.
Cela donne l’impression que le gouvernement n’avait vraiment pas envie de renouveler cet agrément mais qu’il a été contraint de le faire, après avoir tenté en vain de trouver une justification pour un refus. Dans tous les cas, nous étions prêts à porter un refus d’agrément devant le Conseil d’État, ce qui aurait permis de clarifier le cadre légal de l’agrément anti-corruption car il est trop vague aujourd’hui et a permis à l’administration de s’immiscer dans la vie d’Anticor au point de demander quasiment tous nos procès-verbaux de bureau et conseils d’administration de ces quatre dernières années.
Comment expliquez-vous ces six mois de valse-hésitation et polémiques…
Anticor dérange. On agace le pouvoir en place. Nous avons été soupçonnés de viser en priorité des membres de LREM, mais la corruption est un abus de pouvoir, il est normal que les personnes au pouvoir soient davantage exposées. Nous sommes allés sur des dossiers politiques extrêmement dérangeants. (...)
En démocratie, les citoyens ont effet le droit de demander des comptes aux agents publics de leur administration, c’est ce que nous faisons. En le faisant, Anticor est devenu un contre-pouvoir, un petit contre-pouvoir à vrai dire car nos moyens modestes limitent nos actions. La campagne de déstabilisation que nous avons vécue est le signe de l’agacement que nous provoquons. (...)