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La raison du commun : pour une politique de l’inappropriable
Article mis en ligne le 5 juin 2014
dernière modification le 2 juin 2014

Un livre qui constitue une réflexion prenant pour objet la « raison du commun » et cherchant, en référence aux mouvements politiques qui entendent lutter depuis une vingtaine d’années contre la rationalité néo-libérale, à poser les bases d’une politique de l’émancipation qui institue le commun, non en tant que propriété collective, mais en tant qu’inappropriable.

Le nouveau livre de Christian Laval et Pierre Dardot Commun. Essai sur la révolution au XXIème siècle paru il y a peu aux éditions La Découverte constitue une réflexion prenant pour objet la « raison du commun » et cherchant, en référence aux mouvements politiques qui entendent lutter depuis une vingtaine d’années contre la rationalité néo-libérale [p. 16-19], à jeter les prémisses d’une politique de l’émancipation dont l’objectif est de créer des institutions authentiquement démocratiques permettant le déploiement d’un agir commun . L’une des grandes forces de Commun est précisément de réfuter le partage binaire entre l’ordre de la théorie et celui de la pratique, en refusant toute approche qui partirait d’une définition abstraite du commun et tenterait d’en déduire artificiellement une politique, mais de prendre pour point de départ l’expérience politique du commun telle qu’elle a pu se vivre au travers des différentes formes d’action et de discours qui ont au cours des deux dernières décennies contesté la logique d’extension du mode d’appropriation privée à toutes les sphères du social, individu inclus . (...)

Le commun n’est pas une idée éternelle, ce n’est pas la forme pure que le Philosophe-Roi devrait contempler dans sa tentative pour fonder la cité juste, c’est le principe dynamique chargé d’organiser et de structurer les pratiques qui contestent la politique globale de privatisation et de marchandisation du monde.

Penser le commun en tant que principe d’une politique d’émancipation démocratique, qui tente de se frayer un chemin étroit par delà l’alternative biaisée du marché et de l’État, implique donc de rompre avec un traitement de la question qui ne renvoie pas à ce dont il faut partir, autrement dit l’activité politique elle-même de mise en commun, mais réduit l’interrogation à un simple problème de gestion de biens ou d’objets en soi inappropriables . Pierre Dardot et Christian Laval prennent soin d’indiquer à ce titre qu’il faut se garder de l’écueil consistant à réifier la notion de commun, en faisant du celui-ci une réalité substantielle existant hors des prises de l’agir humain et résistant à toute tentative d’appropriation : en ce sens il semble assuré que l’air, l’eau, la lumière ou encore les nuages relèvent de cette catégorie de biens inappropriables, puisqu’ils qu’ils sont donnés naturellement, et qu’il est dans cette perspective inutile de se les approprier en raison soit de leur caractère inépuisable (cas de l’air ou de l’eau), soit de leur caractère insaisissable (cas des nuages ou de la lumière) (...)

Se situant dans la filiation des mouvements et des luttes qui ont cherché à instaurer des rapports sociaux fondés aussi bien sur la coopération que sur le partage, et se sont donc efforcés d’élaborer et de construire quelque chose qui soit commun, Pierre Dardot et Christian Laval s’efforcent dans ce livre de réfléchir avec brio une politique de l’inappropriable.