
La plus haute juridiction administrative a rejeté les requêtes de syndicats qui dénonçaient la « dangerosité » des fichiers mentionnant les opinions politiques, appartenances syndicales et données de santé.
Le Conseil d’Etat l’a confirmé lundi : policiers et gendarmes pourront ficher les opinions politiques, appartenances syndicales et données de santé au nom de la sûreté de l’Etat.
La plus haute juridiction administrative a donné un avis favorable à trois décrets qui élargissent les possibilités de fichage, autorisant policiers et gendarmes à faire mention des « opinions politiques », des « convictions philosophiques et religieuses », et de « l’appartenance syndicale » de leurs cibles, alors que les précédents textes se limitaient à recenser des « activités ».
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Identifiants, photos et commentaires postés sur les réseaux sociaux y seront aussi listés, tout comme les troubles psychologiques et psychiatriques « révélant une dangerosité particulière ». Outre les personnes physiques, les « personnes morales », telles que les associations, sont également visées.
Le Conseil d’Etat avait été saisi en référé (procédure d’urgence) par plusieurs centrales syndicales dont la CGT, FO ou la FSU, mais aussi par le Syndicat de la magistrature et le Syndicat des avocats de France (SM et SAF, classés à gauche), qui dénonçaient le « spectre du Big brother en 2021 ». Mais il a considéré que les trois décrets ne portaient pas une atteinte disproportionnée à la liberté d’opinion, de conscience et de religion ou à la liberté syndicale.
Trois fichiers concernés, le Pasp, le Gipasp et l’EASP
(...) Face à l’émoi à gauche et parmi les défenseurs des libertés, le ministre de l’Intérieur a réfuté à plusieurs reprises toute volonté de « créer un délit d’opinion » ou une surveillance de masse. L’attaque des décrets devant le Conseil d’Etat est intervenue dans un contexte d’accusations répétées de dérive autoritaire du gouvernement - notamment avec les restrictions imposées dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire et la proposition de loi Sécurité globale.
En 2008, le fameux fichier baptisé « Edvige », qui prévoyait notamment de recenser des personnes exerçant ou ayant exercé un mandat politique, syndical ou économique, avait suscité un tel tollé qu’il avait été retiré.