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Le Pujadisme est-il un pluralisme ? Quand France 2 Souche reçoit l’extrême droite plurielle
Article mis en ligne le 12 février 2014

Chaque début d’année c’est la même histoire : à la fin du mois de janvier ou au début du mois de février, le ministre de l’intérieur en place est amené à rendre compte dans les médias des « statistiques de la délinquance » de l’année écoulée. Le 6 février dernier, Manuel Valls était donc l’invité de David Pujadas dans l’émission politique mensuelle de France 2 : « Des paroles et des actes » (DPDA), afin d’y évoquer, pêle-mêle : son « bilan » de l’année 2013, sa « côte de popularité », le « problème de l’immigration », l’ « affaire Dieudonné », le « modèle d’intégration à la française », ses « ambitions », etc. Et tout cela, nous allons le voir, en très bonne compagnie...

Les absents ont toujours tort

Brillent également par leur absence, comme dans la quasi-totalité des émissions sur le sujet, des personnes qui auraient pourtant eu beaucoup à dire du « bilan » de Manuel Valls en matière de sécurité et de « politique d’immigration » : des représentant-e-s d’institutions sociales, culturelles ou médicales, des représentant-e-s de l’éducation nationale et de la Protection Judiciaire de la Jeunesse, des sociologues (Laurent Mucchielli, Laurent Bonelli ?), des magistrat-e-s anti-sécuritaires (Gilles Sainati et Ulrich Schalchli ?) des militant-e-s politiques ou associatifs (LDH, GISTI, Romeurope, La Voix des Roms, Collectifs de sans-papiers, collectifs anti-racistes, collectifs anti-fascistes) ou, tout simplement, des personnes ayant eu affaire à la police ou à la justice.

Tout cela n’est pas nouveau, Pierre Bourdieu par exemple l’a naguère bien expliqué : tous issus peu ou prou des mêmes formations professionnelles (IEP-Paris, CFJ, HEC, ENA), fréquentant également les mêmes milieux sociaux (Xavier Raufer coécrit des livres Alain Bauer, parrain des enfants de Manuel Valls, nous y reviendrons !), nos débatteurs professionnels partagent les mêmes principes de vision et de division du monde social (ici, ceux de la droite et de l’extrême-droite réactionnaire, raciste, islamophobe, antiroms), tant et si bien qu’en monopolisant la parole publique, ils se font, en même temps que les agents du maintien de l’ordre social, les maîtres et gardiens de la hiérarchie des discours légitimes – par exemple, en l’occurrence, des discours sur la délinquance et l’immigration. Les orientations idéologiques de cette émission passent d’autant plus facilement pour légitimes que cette dernière prend les oripeaux d’un processus délibératif délivrant une « vérité objective » – qui n’est en réalité que l’expression de l’ethnocentrisme de ses intervenants. (...)