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Irin
Le lien manquant entre les chercheurs et les paysans zimbabwéens
Article mis en ligne le 22 août 2017
dernière modification le 20 août 2017

Dans les régions du Zimbabwe sujettes à la sécheresse, les semences de maïs devraient maintenant être accompagnées d’une mise en garde de santé publique : « planter peut nuire gravement à votre bien-être ».

Car si, dans les bonnes conditions, le maïs est un champion du rendement, il est très vulnérable au stress hydrique. Il suffit que les pluies se fassent attendre ou qu’elles arrivent trop tôt pour que toute une récolte soit perdue. (...)

Gwanda se trouve dans le Matabeleland, une région frappée par une succession de mauvaises récoltes due à l’une des manifestations d’El Niño les plus intenses jamais enregistrées. Les agriculteurs locaux vivent dans une grande pauvreté et ont peu accès à des financements. Ils n’ont pas les moyens de mettre en place des systèmes d’irrigation et leur production dépend donc des précipitations.

Le changement climatique va entraîner encore plus de sécheresse au Zimbabwe. L’État et les organismes de recherche doivent donc mettre au point et promouvoir des cultures alternatives plus résilientes.

Résistance au changement

Les petites céréales comme l’éleusine, le mil à chandelle et le sorgho, qui résistent mieux aux sécheresses, faisaient partie du régime alimentaire traditionnel au Zimbabwe bien avant que le maïs prenne la première place dans les champs de toute l’Afrique australe il y a plus d’un siècle. Mais il est très difficile de remettre ces céréales au goût du jour. Le maïs s’est imposé parce que ses rendements sont plus élevés, parce qu’il demande moins de travail et parce que ses feuilles protègent bien les grains des oiseaux et autres nuisibles.

La puissante agro-industrie présente le maïs comme l’élément essentiel du régime alimentaire et de la vie quotidienne au Zimbabwe. Le mil et le sorgho sont présents sur les étals des supermarchés, mais ce sont plutôt des produits de niche. (...)

Kizito Mazvimavi, directeur l’Institut international de recherche sur les cultures des zones tropicales semi-arides, tempère : « Toute activité agricole nécessite de la main-d’œuvre. » Mais son organisation a beau promouvoir les petites céréales, il reconnaît que les équipements de transformation sont « limités et difficiles d’accès pour de nombreuses zones rurales », ce qui rend les conversions plus difficiles encore.

Mme Moyo a précisé qu’elle n’était pas réfractaire à l’idée de cultiver de petites céréales si celles-ci étaient rentables, surtout depuis que la production de maïs est devenue si aléatoire. (...)

Selon Shepherd Siziba, président du département d’économie agricole et de vulgarisation de l’université du Zimbabwe, c’est là que les chercheurs et l’État doivent entrer en jeu. Trop peu d’efforts sont déployés pour s’assurer que les études en la matière sont comprises et mises en pratique par les paysans et les paysannes comme Mme Moyo, a-t-il dit à IRIN. « Elles sont menées dans les universités et des ouvrages sur le changement climatique sont publiés, mais ce qu’il manque, c’est un dialogue plus poussé entre les décisions politiques, la recherche et les agriculteurs ». (...)

Les mauvaises récoltes qui se sont succédé au Zimbabwe témoignent de l’urgence des réformes du secteur. Au plus fort de la période de soudure de 2017, 4,1 millions de personnes se trouvaient en situation d’insécurité alimentaire en raison de la sécheresse provoquée par El Niño. Or les programmes d’aide alimentaire au Zimbabwe manquent déjà de financements, et l’administration du président américain Donald Trump menace de couper ses contributions dans le pays et notamment dans les programmes visant à limiter les effets du changement climatique. Le Zimbabwe pourrait manquer de temps pour mettre au point une stratégie agricole adaptée.