
En quatre ans et demi d’existence, 184 éditions hebdomadaires, près de 2000 articles publiés et des dizaines de millions de consultations, notre site n’avait jusqu’à présent jamais été inquiété ou poursuivi par la justice du fait du contenu de ses publications. C’est désormais chose faite.
Mardi dernier, Nick Conrad, un rappeur, était condamné à une peine de 5.000 € d’amende avec sursis du chef de provocation à la commission d’un crime pour la diffusion de son clip volontairement provocateur Pendez les blancs [1]. Le 22 janvier nous avions publié un compte rendu analytique de l’audience dans un article intitulé « Retour sur le procès de Nick Conrad ». Nous encourageons évidemment nos lecteurs à lire ou relire cet article dont nous assumons pleinement la qualité tant journalistique qu’analytique.
Hasard du calendrier ou non, quelques heures après l’annonce de cette condamnation, dont le rappeur a annoncé qu’il interjetait appel, nous recevions d’un service d’enquête parisien une réquisition judiciaire, adressée par mail via le formulaire de contact de lundimatin. (...)
Le parquet de Paris ouvre une enquête préliminaire contre lundimatin
« Pendez lundimatin »
paru dans lundimatin#184, le 25 mars 2019
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En quatre ans et demi d’existence, 184 éditions hebdomadaires, près de 2000 articles publiés et des dizaines de millions de consultations, notre site n’avait jusqu’à présent jamais été inquiété ou poursuivi par la justice du fait du contenu de ses publications. C’est désormais chose faite.
Mardi dernier, Nick Conrad, un rappeur, était condamné à une peine de 5.000 € d’amende avec sursis du chef de provocation à la commission d’un crime pour la diffusion de son clip volontairement provocateur Pendez les blancs [1]. Le 22 janvier nous avions publié un compte rendu analytique de l’audience dans un article intitulé « Retour sur le procès de Nick Conrad ». Nous encourageons évidemment nos lecteurs à lire ou relire cet article dont nous assumons pleinement la qualité tant journalistique qu’analytique.
Hasard du calendrier ou non, quelques heures après l’annonce de cette condamnation, dont le rappeur a annoncé qu’il interjetait appel, nous recevions d’un service d’enquête parisien une réquisition judiciaire, adressée par mail via le formulaire de contact de lundimatin. (...)
Nous nous sommes dans un premier temps interrogés sur ce qui, dans l’article, pouvait conduire un magistrat à ouvrir une enquête préliminaire pour un chef aussi saugrenu tant, à la relecture, cette publication nous paraît absolument inattaquable sur le plan juridique de par sa rigueur journalistique. Et puis nous avons compris, par défaut, quel prétexte avait pu justifier le déclenchement d’une telle enquête : le sous-titre « Pendez l’AGRIF », en référence à ce lobby d’extrême-droite ayant pour mission la « défense de l’identité française et chrétienne », partie civile dans le procès de Nick Conrad, en effet éreinté tout au long de l’article en question.
Il n’a cependant pas pu échapper au substitut du procureur que ce sous-titre relevait du détournement, de la satire et de l’ironie, pratiques littéraires pour le moins habituelles dans bon nombre d’organes de presse. Au reste, l’idée qu’il serait envisageable de pendre un acronyme au bout d’une potence comporte aussi sa part d’humour. Pour clore la question, nous attirons l’attention du parquet de Paris sur les guillemets entourant ce qu’il qualifie de provocation à la commission d’un crime. Il suffit d’ouvrir un dictionnaire pour apprendre qu’en langue française, les guillemets ont trois usages : la citation, la mise en relief d’un terme ou l’indication que le terme ou l’expression mis en exergue n’a pas sa signification littérale ou habituelle — on parle alors de guillemets d’ironie. Le fait que la locution « Pendez l’AGRIF » ne figure pas dans le corps de l’article doublé d’une connaissance minimale des usages de la langue devrait permettre à nos enquêteurs de déduire que si ce sous-titre pourrait parfaitement être qualifié de provocation, sa qualification pénale est quant à elle infondée. Nous restons donc convaincu qu’une telle procédure ne peut qu’aboutir à un classement sans suite ou, au pire, une relaxe devant un tribunal correctionnel, mais comprenons que la ’discussion’ aura sans doute lieu autour de ce sous-titre.
Nous nous sommes ensuite interrogés sur l’origine de ces poursuites. En matière d’infractions de presse, certaines supposent une plainte préalable de la victime avant toute poursuite, et pour lesquelles le parquet ne diligente en général pas d’enquête d’initiative ; mais l’infraction de provocation à la commission d’atteinte volontaire à la vie n’en fait pas partie [3]. Dès lors deux hypothèses étaient envisageables : une plainte de l’AGRIF auprès du parquet de Paris qui envoie en enquête, ou bien une initiative du parquet. (...)
Après une brève recherche, nous découvrions que le 24 janvier, l’AGRIF annonçait sur son site mandater son avocat Me Triomphe (!) pour déposer plainte contre lundimatin. L’exploit du parquet n’en est cependant que plus grand : 4 jours pour traiter la plainte et ouvrir cette enquête à notre encontre, en incluant le week-end. Quelle diligence !
Il n’échappera pas à nos lecteurs et confrères que ces réquisitions nous sont transmises quelques heures après la condamnation du rappeur et plus généralement dans une période particulièrement troublée. (...)
En réponse aux réquisitions (...)
Rappelons que le ministre Blanquer a régulièrement menacé de poursuites celles et ceux qui évoquent l’existence d’un racisme d’Etat, que le ministère de l’Intérieur nie méthodiquement l’existence pourtant avérée de violences policières, que des associations telles que l’AGRIF ont pour seule raison d’être d’entamer des poursuites pour essayer d’exister publiquement, que certains journalistes sont désormais fichés S pour atteinte à la sureté de l’État, que les services de renseignement ne cachent plus la mise sur écoute de dizaines, voire de centaines de gilets jaunes et que le Sénat assume que le fichage politique se fasse par capillarité, y compris à l’endroit de personnes ne représentant aucun danger.
Soyez donc certains que nous prenons très au sérieux cette liberté éditoriale autant que les dispositifs techniques qui la garantissent. (...)
Depuis sa création en 2014, nos activités sont légalement adossées à une association loi 1901. Bien que ne faisant pas partie de la rédaction du site, sa présidente comme les personnes résidant à l’adresse du siège social se tiennent à la disposition de la justice. Nous avons pleinement confiance en leur capacité à se défendre, voire à défendre les intérêts de notre site d’informations. Ils ne seront cependant pas en mesure d’apporter une quelconque précision quant à la publication litigieuse. (...)