Les réponses gouvernementales et populaires face à la pandémie se mettent en place. Pendant ce temps, une crise financière s’est déployée sans que nous soyons convié.e.s à la discussion. Banques centrales et gouvernements empilent les annonces de soutien par dizaines de milliards, pour nous rassurer et nous permettre de passer la tempête. Elles sont aussi là pour éviter la faillite du système bancaire, et éviter trop de pertes aux « investisseurs ».
Un plan de sauvetage des banques camouflé
Alors que les gouvernements nous communiquaient les mesures visant à cantonner l’expansion du Coronavirus et que, chacun.e, nous prenions progressivement la mesure de ce qui allait nous arriver, les mêmes gouvernements, la Commission européenne et les banques centrales annonçaient des plans massifs de « soutien à l’économie » :
25 milliards en Italie, des dizaines de milliards, sans plafond, « quel qu’en soit le coût » en France, 50 milliards de dollars dans le cadre du plan d’urgence aux USA, 37 milliards alloués par les institutions européennes…
Tout cela arrive sur fond de « crise financière », ou plutôt de panique majeure des investisseurs qui constatent bien que, non, ils ne feront pas les bénéfices escomptés cette année. Quoique. Parce que ces plans de sauvetage, quelles visées ont-ils ? Certes, les annonces peuvent nous apaiser, apaiser les entrepreneurs et entrepreneuses, les employé.e.s des petites entreprises et autres structures : une allocation leur sera payée en remplacement de leurs revenus.
Mais ces mesures ressemblent aussi diablement à un massif plan de sauvetage des banques qui ne porte pas son nom. (...)
Ceux qui sont vraiment touchés par la crise financière
Des semaines que les bourses paniquent, que les investisseurs et autres détenteurs de capitaux courent comme des poulets sans tête, vendant ce qui pourrait ne plus rapporter autant que prévu à cause des arrêts de production, de la chute de la consommation, et donc des moindres profits à venir ; achetant ce qu’ils espèrent pouvoir être un meilleur pari.
Pendant ces semaines, presque rien dans les journaux papier grand public sur les krachs boursiers en cours. Quelques lignes ici et là. Quelques minutes aux journaux des radios et des télévisions. Comme une anecdote, un vague fait divers.
Pourtant, les journaux économiques en font leur une depuis le tout début de la propagation du virus. Et cela occupait très certainement le premier rang des préoccupations de la minorité d’individus dont le patrimoine est très lié aux cours de bourse et autres valeurs financières. Les banquiers et conseillers financiers à leur service devaient être sur la balle depuis quelques temps.
« On » n’en a pas parlé au-delà des cercles avertis parce que le virus, au fur et à mesure de son avancée, avait un impact beaucoup plus immédiat sur les populations que les tribulations boursières (...)
lorsque après des années de délire spéculatif, après des années de soutien à la « croissance » grâce à l’argent facile des banques centrales, après des années d’un endettement impossible à soutenir et pourtant bien là, après des années de complaisance des États envers le secteur financier, lorsque – après tout cela et plus encore – la valeur des titres financiers s’effondre, ce sont les banques, au cœur de la machine à fabriquer des dettes et des produits financiers, qui risquent l’explosion.
Et lorsque dans le même temps, les ménages et les entreprises rencontrent des difficultés telles qu’ils ne pourront rembourser leurs crédits, cela ne fait qu’ajouter aux risques de faillites bancaires. Alors oui nous sommes bien dans une situation similaire à celle de 2008. (...)
Alors, qui va payer tou.te.s ces employé.e.s, déclaré.e.s ou pas, bénéficiaires d’allocations ou pas, laissé.e.s sur le carreau mais qui devront pourtant bien payer le loyer, l’eau, le gaz, l’électricité, les courses… et le remboursement des crédits ? C’est une question importante.
Pourtant, la simplicité et l’énormité de la réponse des États et des banques centrales mélange la prise en charge de tout cela avec un autre sauvetage qui serait absolument inacceptable pour la population : celui des banques et du système financier, sans remise en question profonde de leur fonctionnement, de ce qu’elles sont occupées à faire, de qui les possède. (...)
Qui doit payer le grand sauvetage de l’économie, et de quelle économie parle-t-on, de qui parle-t-on ? Arrêtons de croire que des pertes importantes dans la finance et dans les banques seraient une catastrophe pour tout la monde. Imposer les pertes à ceux qui ont accumulé sur notre dos et au prix de destructions incommensurables depuis toutes ces années, est une nécessité – et ne nous inquiétons pas : ils en ont très largement les moyens.