
A l’heure où à gauche, depuis Nuit Debout, se pose la question de la convergence des luttes, voilà qu’une proposition se dessine dans une perspective originale. Etre végane, c’est d’abord s’opposer au spécisme, compris par les adeptes du véganisme dans les mêmes termes que le racisme. Alors que le racisme revient en définitive à penser qu’une race serait supérieure aux autres, les spécistes estiment qu’une espèce, en l’occurrence humaine, aurait tous les droits sur les autres, notamment celui de les maintenir en captivité et les exploiter pour les manger, se divertir (corrida, équitation, zoo) ou s’en vêtir.
(...) « Nous sommes véganes, enfin, parce que nous sommes écoféministes et humanistes. Nous condamnons toutes les formes de privilèges injustes ou de discriminations arbitraires : spécisme bien sûr, mais aussi capacitisme [discriminant les personnes vivant un handicap], racisme, classisme, sexisme, hétérosexisme, transphobie, grossophobie, etc. Nous croyons que c’est à l’intersection de ces oppressions qu’il faut penser la lutte. » (...)
D’autres articles encore font le lien avec l’écologie, comme celui de Mélissa de La Fontaine qui aborde les déménagements à vélo ou les propositions pour mettre fin à la production de déchets.
Voltaire végane
Une rubrique « Documents », particulièrement intéressante, montre que si le véganisme est récent comme doctrine (son apparition sous cette domination est concomitante de la création de la Vegan Society en Grande-Bretagne en 1944), on trouve des textes décisifs chez des auteurs comme Voltaire, que présente Renan Larue. Chez le philosophe des Lumières, la défense des animaux se présente clairement comme une extension de l’humanisme au même titre que le féminisme, l’appel à la tolérance ou la remise en cause de l’esclavage. (...)
Véganes est bien en ce sens une revue « contreculturelle » visant à changer profondément la société. Dans son éditorial, la co-fondatrice de l’association L214 connue du grand public pour ses vidéos tournées dans les abattoirs, Brigitte Gothière, appelle à « un autre monde à construire ensemble », s’appuyant sur « la rigueur du raisonnement éthique, les preuves scientifiques de la sentience des animaux [capacité de ressentir des émotions et des désirs], l’injustice et la cruauté de leur sort dévoilées au grand jour ». (...)