Bandeau
mcInform@ctions
Travail de fourmi, effet papillon...
Descriptif du site
Ecologie politique
Le voyage, un droit humain ?
Article mis en ligne le 21 mai 2013
dernière modification le 17 mai 2013

La petite bourgeoisie, communément appelée classe moyenne, c’est cette classe sociale qui, privée de pouvoir économique, n’est pas responsable de l’abjection ambiante mais profite toutefois de ses retombées. Une classe sociale repue de droits et qui ne se reconnaît aucun devoir. Voyage au pays de la petite bourgeoisie, par une déclassée, en trois temps : militer, faire soi-même, voyager.

Il existe en anglais une expression (well travelled) qui considère qu’on peut être « bien voyagé » comme on est bien éduqué ou bien formé. En français on ne dit pas le contraire : « Les voyages forment la jeunesse ». Et de fait, connaître un seul exemple de société, de même que connaître une seule langue, n’aide pas à la comprendre. On est plus provincial quand on ne quitte jamais Paris que quand on habite « en région » et qu’on va régulièrement à la rencontre d’ami-e-s ou de collègues à Marseille ou Nantes. Allons plus loin : le tourisme a la vertu de protéger un patrimoine naturel ou bâti jugé peu précieux à un moment de leur histoire par certaines sociétés (1). Et le voyage nous met dans une bonne volonté culturelle souvent inédite, renouvelant (comme une expo temporaire bien médiatisée) notre intérêt pour les musées et les monuments historiques.

Mais n’accorde-t-on pas au voyage une fonction plus prestigieuse que toutes les autres activités qui sont censées nous élargir l’esprit ? Et n’accorde-t-on pas à tous les voyages des vertus qui sont l’apanage de certains d’entre eux seulement ?

Au-delà de la zone de confort

Il y a voyage et voyage, ou plutôt voyage et tourisme. (...)

L’exotisme, c’est cet intérêt superficiel pour les autres, qui s’éteint dès qu’il est satisfait à peu de frais. Ce serait visiter Angkor en un jour en s’extasiant sur la beauté des statues mais sans s’intéresser au contexte social et politique de la société khmère de l’époque. Ce serait manger un repas exotique structuré en entrée-plat-dessert et pris comme dans un restaurant occidental, service à l’assiette individuelle. Ce serait enlever ses chaussures dans les temples mais pas dans les logements (alors qu’ils sont arrangés dans l’idée qu’on y marche pieds nus, en particulier les tapis ou les salles de bain) ou mettre ses pieds chaussés sur un fauteuil. Ou joindre les mains pour dire merci à la va-vite sans prendre le temps de s’arrêter (on dit « thanks » en marchant, mais le wai des pays bouddhistes est plus exigeant). Les exemples ne manquent pas d’un mépris qui se terre sous un semblant d’intérêt.

Les voyages de plusieurs mois, ceux qui « ont du sens », plus en tout cas que les séjours de deux semaines en club, sont toujours des démarches individualistes, de déprise du boulot, de la famille, de la société. Et ces voyages-là se font dans des sociétés structurées encore de manière collective, où les individu-e-s sont bien plus soumis-es que nous à la famille ou au groupe social. (...)

S’il est un impensé des voyages aéroportés, chez les citoyen-ne-s du monde à la découverte des autres cultures qui le peuplent, c’est le bilan environnemental. (...)

parfois ce qu’on peut faire de mieux pour le monde, c’est d’accepter de ne pas le visiter.