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Les attaques contre l’Etat de droit : un danger pour la démocratie
Article mis en ligne le 12 août 2022

L’affaire « Hassan Iquioussen » – personnage dont le discours se situe aux antipodes des valeurs portées par notre collectif – a mis en lumière combien ce qui semblait être un acquis de notre démocratie, à savoir le respect de l’Etat de droit, se trouve en réalité contesté par nombre de nos propres « élites » politiques, administratives et intellectuelles. L’ère est à nouveau à la trahison de Clercs…

Ministre ou juristes « émérites » estiment ainsi que lorsqu’un juge place les droits fondamentaux au-dessus des actes d’un politique il menace la République et son Etat de droit. Une fois n’est pas coutume, j’aimerais saluer la définition donnée il y a quelques temps par François Molins de l’Etat de droit. Cette définition, tweetable[1], a le mérite d’être concise et claire : « L’Etat de droit est la garantie que les autorités publiques agissent toujours dans le respect de la loi et des droits fondamentaux et sous le contrôle de juridictions indépendantes et impartiales, conformément aux exigences de la démocratie. Il nécessite une vigilance permanente » . (...)

Agir dans le respect des lois et des droits fondamentaux et sous contrôle de juridiction indépendantes

Le Procureur général près la Cour de cassation fait ressortir les éléments clefs de cette notion ; la garantie que les autorités publiques, administration ou évidemment politiques, n’agissent pas en opposition du cadre légal et surtout des droits fondamentaux. Des garanties et protections appellent nécessairement des garants et protecteurs et c’est le juge, judiciaire ou administratif, qui a, en cette matière, un rôle primordial. Le juge judiciaire en tant que garant des libertés individuelles et le juge administratif en tant que responsable du contrôle des actes de l’administration se doivent de faire respecter l’Etat de droit.

Aujourd’hui un acte de l’administration, pris par ailleurs par son plus haut représentant, a été jugé par un magistrat comme représentant une atteinte manifeste à une liberté fondamentale. Cette décision, qui fait l’objet d’un appel de la part du ministre de l’intérieur, est sous le feu des critiques.

D’une part, des critiques de la partie « perdante » au dossier. C’est compréhensible et l’appel légal.

Cependant, Gérald Darmanin a déjà prévenu, s’il n’obtenait pas satisfaction devant le Conseil d’Etat, alors il en prendrait acte pour changer la loi, pour supprimer les freins qui l’empêchent d’agir. Cette menace est loin d’être anodine car il n’est pas possible de supprimer ces freins sans atteindre durablement à notre système de protection des libertés fondamentales, système qui profite à tout un chacun. Les droits fondamentaux sont et doivent rester la boussole qui guide chaque société démocratique. (...)

D’autre part, plusieurs voix se sont élevées pour dénoncer la décision du tribunal administratif. Certains juristes osent titrer leur tribune « Au nom de l’État de droit, le Tribunal administratif de Paris désarme l’État de droit ». Mais de quel Etat de droit parlent-ils ? Le juge en charge a pu estimer que la violation des libertés fondamentales était manifestement grave et illégale car disproportionné au but recherché. C’est ici l’office du juge et n’allez pas croire ceux qui pensent que cet office est laxiste car c’est souvent l’inverse ; et dans un tel dossier, médiatiquement et politiquement sensible, sachez que cet office a été mené avec la plus grande rigueur.

La défense de l’Etat de droit nécessite une vigilance permanente

Placer les droits fondamentaux au-dessus de toute chose devrait sembler anodin et naturel mais il n’en est rien. Chaque jour, notamment en droit des étrangers, un véritable combat se mène devant les tribunaux pour que les droits humains l’emportent sur la politique migratoire du gouvernement. De ce duel quotidien contre une administration aveugle de nombreuses décisions de justice viennent donner droit aux personnes étrangères et reconnaître les violations de la loi par l’administration. Cependant malgré cela, le ministère, les préfectures, font parfois fi de ces décisions (...)

si l’Etat de droit est menacé dans certains pans de notre société, la menace ne réside pas dans cette décision du tribunal administratif de Paris mais bel et bien dans les commentaires et réactions qui l’entourent.