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Les politiques et le divertissement télévisuel
(extrait de La politique sur un plateau, de Ph. Riutort et P. Leroux)
Article mis en ligne le 22 octobre 2014
dernière modification le 14 octobre 2014

(...) L’extrait qui suit (p. 23-28) est issu du premier chapitre, qui traite de « l’émergence de nouveaux espaces médiatico-politiques », et présente les grandes étapes qui ont conduit, au cours des 30 dernières années, les responsables politiques jusqu’au cœur d’émissions de divertissement où il n’est jamais question… de politique.

(...) Le passage d’une télévision marquée par un certain volontarisme de l’offre à celle de la recherche du public cible de la télévision commerciale (symbolisé par la « ménagère de moins de 50 ans ») s’accompagne pour les chaînes généralistes de la volonté toujours plus forte d’anticiper les attentes en abandonnant les objectifs initiaux de la télévision de monopole de service public (le fameux triptyque « informer, éduquer, divertir »), et consacre, en premier lieu, le divertissement qui se voit octroyer une place croissante dans les grilles de programmes. (...)

Cette évolution est fortement accentuée en France par la création en 1985, de La Cinq, sur le modèle de son homonyme italienne, et TF1, avant même sa privatisation en 1986, sous la direction d’Hervé Bourges [1] s’inscrit dans ce mouvement de fluidification des grilles, caractéristique de la « néotélévision » [2], en recourant au principe du « mélange des genres ». (...)

La présence d’invités télévisés s’observe aussi dans quelques jeux télévisés comme L’Académie des neuf (Antenne 2, 1982-1987, présentée par Jean-Pierre Foucault) ou Tournez manège sur TF1, où le ministre de la culture Jack Lang et le député UDF André Santini [5] sont conviés. Le glissement vers le dévoilement de soi se retrouve encore dans l’apparition d’émissions de témoignages qui invitent à la confidence et à la confession essentiellement des anonymes [6] mais aussi parfois des célébrités. Le critique cinématographique Henri Chapier, avec Le Divan (France 3, 1987-1994), interviewe une personnalité en parodiant une séance chez le psychanalyste [7]. Avec Qu’avez-vous fait de vos 20 ans ? (1990-1992), la journaliste Christine Ockrent propose le retour nostalgique sur les années de jeunesse de personnalités dont bon nombre appartiennent à l’univers politique. Le dévoilement de la face privée de l’homme public ne constitue pas véritablement une nouveauté [8] – puisque certaines émissions y ont déjà contribué –, mais le cadre de la prise de parole a évolué : le responsable politique n’est plus convié pour ce qu’il a à dire (il respecte d’ailleurs la consigne et n’utilise pas cet espace comme une tribune politique) mais pour ce qu’il est, un personnage public amené à faire découvrir sa personnalité. Il existe cependant des limites à ce dévoilement très contrôlé du personnage politique, comme l’attestent les échecs des quelques tentatives des émissions de réalité politique en France [9], en dépit de quelques timides incursions [10].

La profusion des espaces mixtes

Les années 2000 sont marquées par la multiplication d’« espaces mixtes » télévisuels intégrant à un programme ludique une tonalité plus ou moins clairement orientée vers l’actualité. (...)