
Le débat sur les retraites serait-il devenu un défouloir pour les adversaires de cet acquis social qui leur répugne, mais qui est si essentiel pour ceux qui n’ont pour tout « capital » que leur travail ?
Dans l’émission animée par Philippe Meyer sur France Culture, pourtant appelée « L’ Esprit public », on a pu entendre, dimanche 24 octobre 2010, M. Jean-Louis Bourlanges, professeur à l’Institut d’Études Politiques de Paris, qui se définit lui-même comme « un centriste », assimiler le retraité à un rentier avec quelques précautions de langage qui ne changent rien au fond du problème : « Les Socialistes, s’est-il écrié, ont inventé le rentier à temps partiel. Avec les 35 heures on est rentier deux jours et demi par semaine et avec la retraite, on a ce moment privilégié entre 60 et 70 ans où on est supposé pleinement maître de ses moyens intellectuels, sexuels, de voyage, etc. sans être obligé de travailler. C’est ça le rentier. C’est l’homme qui pourrait travailler et qui est dispensé de travailler. Or, ça, ça n’est plus possible (…) »
Aucun de ses interlocuteurs ne l’a repris. Or, peut-on parler de rente à propos d’une retraite de salarié et qualifier ce dernier de rentier ? Qu’est-ce qu’une rente ? Selon les contextes économiques, les définitions varient. Mais y en a-t-il une seule qui corresponde au revenu versé mensuellement à un salarié qui a été admis aujourd’hui à faire valoir ses droits à la retraite ?
(...) Il semble que les économistes libéralistes qui font la confusion, soient incapables d’imaginer une autre grille de lecture que celle qui s’attache à rentabiliser la propriété d’un capital par plus-values et profits. Ils voudraient tant récupérer cette masse salariale qui leur échappe pour aller la jouer au casino de la finance. Aussi selon eux, le versement d’un revenu mensuel à un salarié retraité est-il assimilable à celui que perçoit de ses propriétés foncières ou mobilières ou encore de ses titres boursiers leur détenteur. En somme, rien ne différencierait le salarié retraité de la rentière Mme Bettencourt, hormis les sommes perçues.
L’une possède des biens, l’autre non. Les assimiler est donc un amalgame malveillant : les sources de revenus sont, en effet, totalement différentes, voire antinomiques. (...)
La retraite par répartition, au contraire de celle par capitalisation bien connue des économistes libéralistes et des retraités américains aujourd’hui ruinés, est une invention de solidarité ingénieuse qui institue une relation étroite entre les générations d’un pays. (...)