
(...) des voix s’élèvent contre la transposition de directives qui réduisent les droits les plus fondamentaux des migrants. ...
(...) Adopté en l’état, ce projet entraînerait de graves conséquences : privés d’accès au séjour pour soins, enfermés plus longtemps, expulsés plus facilement, bannis d’Europe pendant 2 à 5 ans, les migrants seront acculés à la clandestinité, sans pouvoir faire valoir leurs droits. (...)
Ainsi, entre autres mesures contestables, ce texte marque un grave recul du juge judiciaire, garant de la liberté individuelle. Ce juge contrôle notamment le respect des droits des étrangers arrêtés et placés en centre de rétention administrative : l’administration ne peut pas arrêter quelqu’un n’importe où, n’importe comment. Les tribunaux sont donc conduits à annuler certaines mesures d’éloignement ou de rétention, lorsqu’elles sont irrespectueuses des règles. Pour améliorer l’efficacité de la politique migratoire, ce projet de loi prévoit de passer outre le juge judiciaire.
Selon ce texte, le juge des libertés et de la détention ne sera plus saisi qu’au terme de 5 jours de privation de liberté, contre 2 aujourd’hui. (...)
Ce report de l’intervention du juge n’est dicté par aucun impératif de transposition d’une quelconque directive européenne. Il est même contraire à l’esprit de la directive Retour, qui exige un contrôle juridictionnel de la légalité de la rétention, « dans les meilleurs délais ». (...)
Notre Constitution a énoncé des principes de protection des personnes contre l’arbitraire, principes repris par la Déclaration européenne des droits de l’homme. Nos gouvernants ne peuvent pas s’attaquer à ces principes mais il est un moyen de les neutraliser sans les remettre directement en cause : rendre impossible la saisine du juge chargé d’en contrôler le respect.
Patrick PEUGEOT (président de La CIMADE)
François SOULAGE (président du Secours catholique)
Christophe DELTOMBE (président d’Emmaüs France)