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Lire : Les plaisirs du journalisme, de Claude Angeli et Pierre-Édouard Deldique
Article mis en ligne le 18 mai 2018
dernière modification le 17 mai 2018

Dans Les plaisirs du journalisme [1], Claude Angeli, journaliste au Canard enchaîné depuis 1971 [2], et Pierre-Édouard Deldique, journaliste à RFI, donnent à voir leur conception, les conditions de possibilité des pratiques et des effets du métier de journaliste fondé sur des enquêtes qui ont fait et font l’utilité publique et la notoriété du « palmipède » en dévoilant des « affaires » qui contredisent la représentation enchantée d’elles-mêmes et de leurs activités que les « élites » imposent et que le journalisme dominant ratifie la plupart du temps.

Une certaine idée du journalisme et de son rôle dans l’espace public
En opposition aux formes de simili journalisme que sont le journalisme de « magnétophone », de « présentation » [3], de « commentaire », et celui « à la « moi je pense que », qui se limite à commenter les sondages sans trop se fatiguer » [4] Angeli et Deldique rappellent qu’ « [i]l y a un journalisme d’enquête qui, en lui-même, est un pléonasme. Depuis la fin des années 1960, la recherche et la publication d’informations constituent la base du journalisme tel qu’on le conçoit au Canard. »

Cette conception du journalisme comparé à de l’« artisanat » [5] prend en compte le fait qu’il n’y a pas d’immaculée conception de l’information : « L’information ne tombe pas du ciel (…) Rien ne peut remplacer le travail d’enquête et la chasse aux informations, l’un des plaisirs du métier », et nécessite, en plus d’un travail de connaissance de l’objet d’enquête, de savoir recourir à des « informateurs » dont certains « ont pris des risques pour informer le Canard, pour le mettre sur une piste ou lui transmettre un document ». Cela amène Angeli et Deldique à postuler à juste titre que « chaque citoyen peut exercer un droit d’alerte » et à confirmer ainsi un propos attribué à l’un des pères de l’Église selon lequel « il y a du pollen sur toutes les fleurs ».

Cette pratique du journalisme est articulée à une idée claire de son rôle dans l’espace public, à savoir « la recherche et la diffusion d’informations que l’on cache au public ». Et l’un des « terrains » d’exercice de cette pratique est celui des questions de défense et de relations internationales [6] à propos desquelles les auteurs remarquent qu’« il est anormal que les décisions et les analyses de politique étrangère échappent au contrôle du Parlement, trop souvent méprisé, et demeurent ignorées des Français, en vertu du sacro-saint domaine réservé du président de la République » et relèvent « l’absence de débats et de votes au Parlement sur toute décision engageant la France à l’étranger ».

Propriété des médias, publicité et cadre légal des conditions de travail (...)

"La propriété, par quelques oligarques, de plusieurs journaux, chaînes de télévision et stations de radio, constitue un sérieux obstacle à la liberté de la presse. Mais la « servitude volontaire », l’autocensure admise par certains journalistes et l’absence de remise en cause de leurs actionnaires sont d’autres écueils à la pratique de ce métier. Sans liberté ni indépendance, l’information évolue entre complaisance, connivence et complicité. Elle est corrompue. ». (...)

Il serait cependant trompeur d’imaginer qu’il est suffisant de ne pas dépendre des forces de l’argent pour pouvoir enquêter en toute liberté : des détenteurs du pouvoir politique contribuent à mettre en place des dispositifs de surveillance exerçant ou pouvant exercer des effets sur l’activité journalistique. (...)

Les plaisirs du journalisme ? À l’écart du tumulte artificiel dans lequel s’épanouissent les éditocrates, les « journalistes » nombrilistes et ceux qui sont au service des dominants, il existe des journalistes, comme Claude Angeli et Pierre-Édouard Deldique, qui considèrent que leur métier ne vaudrait pas une heure de peine s’ils ne portaient pas à la connaissance du public des informations, obtenues par un patient travail d’enquête, qui contribuent au dévoilement chez des dominants de tous ordres de pratiques illégales et/ou en contradiction avec l’ intérêt général. « Le plaisir de savoir » et de faire savoir…