
Alors que la Fondation Abbé Pierre publie son rapport annuel qui montre qu’il y a en France 4 millions de personnes mal-logées dont 143 000 à la rue, nous voulons mettre en avant un certain nombre de constats accablants pour ceux qui sont nos dirigeants politiques depuis 30 ans : la vie chère est la conséquence directe de leurs choix politiques de déréglementation
(...) nous voulons mettre en avant un certain nombre de constats accablants pour ceux qui sont nos dirigeants politiques depuis 30 ans : la vie chère est la conséquence directe de leurs choix politiques de déréglementation au profit du secteur privé et si le droit au logement pour tous n’est pas effectif c’est aussi un choix qui maintient l’épée de Damoclès de la rue au-dessus de nos têtes. Alors à quoi bon « interpeller » ou « sensibiliser » certains candidats à la présidentielle qui ont participé à l’organisation de l’appauvrissement des classes laborieuses ? (...)
Ce qui fonde la perception que nous avons du coût de la vie, c’est tout d’abord le prix des biens et services. Il y a quelques années, l’euro était sur le banc des accusés pour expliquer l’augmentation des prix (inflation) ressentie. Pourtant, après le passage à la monnaie unique européenne, on ne constatait que très peu de hausses de prix inhabituelles car « les pouvoirs publics avaient anticipé un tel phénomène en invitant différents secteurs à geler temporairement leurs prix », selon Alternatives économiques. L’inflation qu’on a pu ressentir à ce moment-là aurait donc été surtout imputable au changement de nos repères.
Mais cette perception révèle une chose : nous avons tendance à nous focaliser sur les prix de consommation pour mesurer notre niveau de vie. Et là, il faut avouer que ces dernières années ont vu de nombreuses baisses de prix et, par conséquent, des biens et des services sont devenus accessibles à la majorité des ménages, principalement grâce au développement du « modèle » low-cost. Que ce soit pour les nouvelles technologies, l’habillement, l’alimentation, ou même les transports, les enseignes ont fait baisser les prix pour les consommateurs, dans une logique toujours plus poussée de domination par les coûts – au détriment des salariés, nous le verrons.
Mais c’est aussi la communication politique qui a développé cette tendance à juger notre niveau de vie à l’aune des prix de nos courses dans les zones commerciales. En 2004, Nicolas Sarkozy, alors ministre de l’Économie avait réuni les industriels et la grande distribution pour obtenir de fortes baisses des produits de grande consommation. L’Insee avait même créé à cette occasion un indice des prix des produits de grande consommation qui a fléchi de 1,6 % entre août 2004 et janvier 2005, validant en partie l’action entreprise par le ministre auprès des industriels.
Mais la médaille a un revers, la baisse des prix se fait paradoxalement au détriment de notre qualité de vie, en tant que travailleur et en tant que consommateur. Quand, pour payer moins cher et ne pas avoir à se déplacer, on achète un produit sur Amazon plutôt que dans un commerce de proximité, ce sont des emplois de commerçants qui sont remplacés par des emplois de magasiniers dans des entrepôts[2], avec pour conséquence une précarisation du travail. Cette logique est ainsi transposable à l’ensemble des secteurs, le transport aérien qui est devenu beaucoup plus accessible mais dont les personnels travaillent plus (aux risques et périls de passagers) et ne sont parfois pas déclarés en France[3], les métiers « uberisés » qui permettent des services à meilleur marché mais qui voient des emplois stables ou des emplois indépendants réglementés, comme les taxis, remplacés par la précarité de l’auto-entrepreneuriat. On peut y ajouter l’habillement fabriqué en Asie dans les conditions que tout le monde connaît, ou l’agriculture intensive qui permet de trouver des caissettes de grillades à prix cassé mais qui se fait au détriment de l’environnement, de la santé des agriculteurs et de la nôtre. (...)
Aujourd’hui la définition du pouvoir d’achat n’est pas la même chez les économistes et chez la majeure partie de la population qui conçoit le pouvoir d’achat comme ce qu’il reste une fois débarrassé des dépenses contraintes et qui voit sa part de liberté diminuer. Les Français ne se reconnaissent plus dans le miroir que l’institution leur tend et ils ont bien raison. (...)
la part prépondérante ne va plus à l’alimentation mais au logement et au transport, autant de dépenses inévitables. (...)
Selon le mot d’Alternatives économiques, « un statisticien, c’est quelqu’un qui vous dit que si vous mettez la tête dans le four et les pieds dans le frigo, en moyenne, ça va[5] » (...)
l’exemple le plus frappant de ces inégalités, ce sont les dépenses de logement, passées de 9 à 21 % en moyenne en 50 ans. L’Insee nous indique qu’en incluant loyers, charges, taxes, remboursements d’emprunts, dépenses d’eau et d’énergie, un ménage sur deux consacre plus de 18,5 % de ses revenus à son habitation principale. « Le coût du logement pèse plus lourdement pour les ménages à faibles ressources, les locataires du parc privé et les accédants à la propriété. Un locataire du parc privé sur cinq dépense plus de 40 % de ses revenus pour se loger ». (...)