
Donald Trump, le président des États-Unis, a indiqué son intention de suspendre le premier texte de loi au monde sur les minerais de conflit, à la grande consternation des organisations de défense des droits et d’autres groupes qui soutiennent que cette législation est indispensable pour résoudre les conflits meurtriers en République démocratique du Congo
À l’issue de plusieurs mois d’enquêtes et de dizaines d’entretiens avec des experts et des employés d’organisations de plaidoyer, IRIN a révélé que non seulement la loi a contribué à l’appauvrissement des communautés congolaises, mais aussi que ses partisans bien intentionnés ont occulté cette réalité et étouffé le débat, permettant ainsi facilement à M. Trump de fouler aux pieds la loi.
Pendant des années, d’éminents universitaires et des journalistes indépendants ont critiqué l’article 1502 de la Loi Dodd-Frank, déplorant ses effets négatifs sur les moyens de subsistance des Congolais et remettant en cause son efficacité dans la résolution des conflits. Dans un rapport détaillé rendu public au mois de février, IRIN a montré que, dans certaines des principales zones minières de la République démocratique du Congo (RDC), le monopole de la production de minerais propres (sans liens avec les conflits armés), a eu une incidence négative sur les communautés. (...)
Malgré le nombre croissant de preuves montrant que l’article 1502 n’a été ni aussi efficace ni aussi inoffensif qu’on le souhaitait, les organisations militantes qui ont joué un rôle moteur dans la promotion de la loi ont du mal à reconnaître ses écueils et continuent de tenir un discours simpliste. De plus, plutôt que de remédier aux lacunes de la législation, les voix dissidentes ont été ignorées afin de défendre la loi coûte que coûte.
Les organisations militantes doivent souvent se battre bec et ongles contre les entreprises qui tentent d’échapper à leurs responsabilités, mais IRIN s’est entretenu avec des employés actuels ou anciens d’ONG de défense des droits qui ont parlé de réactions épidermiques aux critiques portées contre l’article 1502, même lorsque celles-ci provenaient de membres de leur propre organisation. (...)
Le Katanga, aujourd’hui divisé en quatre provinces, accueille bon nombre des pionniers de la chaîne d’approvisionnement de minerais propres. Au mois de février, IRIN a révélé qu’une des premières mines certifiées « libres de conflit » force les mineurs à accepter les prix extrêmement bas qu’on leur impose. Aujourd’hui, près de la moitié des mines validées comme « libre de conflit » se trouve dans le Katanga.
Plus au nord, dans les mines des provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu, le contrôle des minerais qui entrent dans la chaîne d’approvisionnement propre existe plus sur le papier que sur le terrain. Des minerais qui ont bénéficié à des groupes armés peuvent se retrouver dans les chaînes d’approvisionnement de mines libres de conflit au Congo ou peuvent entrer clandestinement au Rwanda ou en Tanzanie. IRIN s’est entretenu avec plusieurs marchands qui empruntent régulièrement ces routes.
La solution logique serait d’empêcher l’accès physique aux mines propres à tout minerai provenant de l’extérieur. Mais cela a tendance à créer des situations de monopole et donc à favoriser des prix plus bas pour les mineurs, comme IRIN et d’autres organisations l’ont démontré. (...)
La majorité des parties prenantes s’accordent à dire que l’article 1502 a apporté quelques avancées. Il y a eu une prise de conscience que les groupes armés, en particulier l’armée nationale, ne devraient pas tirer bénéfice du commerce des minerais. L’adoption de l’article a également obligé les entreprises à surveiller leurs chaînes d’approvisionnement et a conduit certains consommateurs à réfléchir à la provenance des matières premières.
Il est plus difficile de dire si la loi a contribué à atténuer le conflit. (...)