
Le 1er mars 2012, les journalistes étaient nombreux à Bayonne pour la visite du candidat Nicolas Sarkozy. Pourtant, pour beaucoup d’observateurs, le passage du Président dans la ville basque révèle un décalage flagrant entre le traitement journalistique et les faits tels qu’ils se sont réellement déroulés. Inexactitudes, contrevérités, silences, d’autant plus significatifs qu’une autre manifestation, qui s’était déroulée le matin même, n’a même pas été couverte par de « grands » médias nationaux.
(...) « Hué et chahuté, le président-candidat a trouvé refuge dans le Bar du Palais pendant [plus ?] d’une heure avant d’être évacué. », déclare, pour Lexpress.fr, Diane Saint-Réquier. « Nicolas Sarkozy, qui a dû se réfugier dans un bar, dénonce “la violence d’une minorité” », ressasse Libération, « avec AFP ». « Nicolas Sarkozy est retranché dans le bar du Palais » surenchérit en direct Jérémy Brossard pour BFM.
Cette présentation est pour le moins abusive : l’étape du Bar du Palais était prévue dans la visite de Nicolas Sarkozy, et plusieurs habitants l’attendaient à cet endroit pour une discussion à bâtons rompus. La presse était au courant. Dès le matin, les télévisions (comme l’équipe de TF1) repéraient les abords du bar en question. On a d’autant plus de mal à croire que les journalistes n’étaient pas informés de cette étape qu’elle avait été annoncée par le QG de campagne, et que c’est dans ce bar que s’étaient donnés rendez-vous les militants de l’UMP.
Contrairement à ce que laisse entendre l’affirmation, maintes fois répétées, selon laquelle Sarkozy aurait été « chahuté », à aucun moment Sarkozy n’a été malmené ni bousculé. (...)
« Les CRS sont en train d’intervenir pour faire reculer des indépendantistes basques », rapportait, lors de son direct de 16 h 15, BFM [1]. Et, à l’instar de cette chaîne, la plupart des médias ont réduit la population venue montrer son mécontentement à un groupe de nationalistes basques. Or les habitants de Bayonne ont su la veille que Sarkozy se rendait dans leur ville. La manifestation était spontanée, non organisée, et aucun appel n’avait été lancé par des organisations syndicales, politiques ou autres. On peut même dire que les abertzale (nationalistes basques) étaient sous-représentés dans le cortège (...)
Une manifestation non-violente : aucune vitrine cassée, pas la moindre plainte au commissariat de Bayonne. Si les brigades de CRS ont mené des petites charges, leur attitude était pour le moins contenue, et la violence tant décriée s’est résumée à des mouvements de foule bon enfant.
(...)
Enfin, peu de médias se sont réellement posé ces quelques questions dérangeantes : pourquoi Sarkozy a-t-il choisi un parcours au travers de rues étroites, dans une région où il sait la population relativement hostile ? Pourquoi, sachant que le député-maire de Bayonne, Jean Grenet, lui avait déconseillé quelque jour auparavant ? Pour un Président qui a pris tant de précaution à choisir les ouvriers dans les usines qu’il visitait, les journalistes et les « citoyens » qui l’interrogent sur les plateaux télé, comment expliquer tant de naïveté à Bayonne ?