
Le Gouvernement a fait publier au Journal Officiel le décret qui autorise ses services de police à demander à Google et d’autres moteurs de recherche ou annuaires le déréférencement de sites accusés de faire l’apologie du terrorisme. Les sites devront être supprimés des index dans les 48 heures, sans possibilités de recours.
Le texte permet à l’Office central de lutte contre la criminalité liée aux technologies de l’information et de la communication (OCLCTIC) de notifier aux moteurs de recherche les sites accusés de relayer la propagande de terroristes, afin qu’ils soient déréférencés sur le champ, sans qu’un juge ne vérifier l’illégalité des sites en cause. Google et ses concurrents auront 48 heures pour prendre "toute mesure utile destinée à faire cesser le référencement de ces adresses", et devront le faire en respectant scrupuleusement "la confidentialité des données qui leur sont ainsi confiées". Pas question, donc, de publier les ordres de censure. (...)
Le terrorisme n’est pas une notion simple à appréhender juridiquement, et n’a d’ailleurs jamais fait l’objet d’un consensus au niveau international. En France, l’article 412-1 du code pénal liste une série de crimes et de délits qui sont considérés comme des actes de terrorisme (meurtres, enlèvements, détournements d’avions, dégradations, vente d’armes, blanchiment d’argent), mais pour être qualifiés de "terroristes", ces actes doivent avoir été commis "intentionnellement en relation avec une entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler gravement l’ordre public par l’intimidation ou la terreur". De quoi laisser beaucoup de marge d’interprétation.
Hélas, les événements récents consécutifs aux attentats de janvier 2015 à Paris ont rappelé que l’Etat avait une vision très large de l’apologie du terrorisme, au mépris de la liberté d’expression.
Et pendant ce temps, l’Etat paye pour référencer sa propre propagande anti-terroriste sur Google. (...)