
Souleyman était soupçonné d’avoir fait le guet pendant que deux autres manifestants incendiaient une poubelle lors d’une manifestation vendredi au soir. "L’infraction n’est pas suffisamment caractérisée", précise le parquet.
(...) L’étudiant de 23 ans avait été arrêté et placé en garde à vue avec deux autres personnes vendredi 14 avril au soir près de la place de la Concorde à Paris, en marge d’une manifestation contre la réforme des retraites. Il était soupçonné d’avoir fait le guet pendant que les deux autres personnes incendiaient une poubelle, selon une source policière. "Souleyman est très éloigné et part quand il voit que les faits se commettent, assurait à franceinfo l’avocat de Souleyman, maître Arié Alimi, qui a eu accès à la vidéo de la scène. "On le voit à l’angle d’une rue sur la vidéo, et on voit qu’il part", insistait Arié Alimi.
Concernant "les deux autres mis en cause, l’un est déféré en vue d’une comparution immédiate pour dégradation par incendie, l’autre sera présenté au délégué du procureur pour une alternative aux poursuites pour participation à un groupement en vue de commettre des dégradations", précise le parquet.
Une violente interpellation par la BRAV-M fin mars
Souleyman avait déjà été interpellé lundi 20 mars, au soir, rue des Minimes à Paris, en marge d’un rassemblement contre la réforme des retraites, avec six autres personnes. Une arrestation qui avait été enregistrée et que franceinfo s’était procuré au moment des faits. Dans le document sonore d’une vingtaine de minutes, on entend plusieurs policiers de la Brav-M (brigade de répression de l’action violente motorisée) tenir des propos insultants, humiliants, dégradants et agressifs envers sept personnes interpellées (...)
Quelques jours après la révélation de ses propos qui avait suscité de vives réactions dans la classe politique, Souleyman avait également affirmé à franceinfo avoir été victime d’une agression sexuelle lors de cette arrestation. "Au moment des palpations [le policier] m’a fouillé et puis il m’a attrapé par le sexe, je peux dire ça comme ça", avait-il dénoncé. Et dans la foulée, "il m’a dit : ’T’as même pas de couilles’, des propos très sexistes", avait souligné le jeune homme. (...)
Lire aussi :
– (Mediapart)
Victime de la BRAV-M, Souleyman de nouveau interpellé et sali à la télé
Salir une victime de violences policières tout un week-end. Certains syndicats de police et quelques médias n’ont pas attendu le temps de l’enquête pour accuser Souleyman A., 23 ans, d’avoir participé à un incendie de poubelles vendredi, après la décision du Conseil constitutionnel, en marge d’une manifestation place de la Concorde, à Paris. (...)
Le quotidien ne s’embarrassait pas du conditionnel dans les lignes suivantes : « Les trois étudiants ont tenté d’allumer un premier feu de poubelle à la sortie de la station de métro Concorde, avant de se rétracter et de se diriger vers la rue du Chevalier de Saint-Georges, à l’abri des regards. » (...)
les syndicats de police se sont précipités pour discréditer Souleyman et ainsi réhabiliter les agents de la BRAV-M, malgré l’enregistrement accablant. « Pour @BFMTV @libe @Loopsidernews… qui ont présenté cet individu comme une victime sans lien avec les activistes violents. À ceux ayant privé de droit de réponse nos collègues de la BRAV-M. Ce provocateur et ses copains anar’ sont en GAV pour destruction par le feu la nuit dernière », a ainsi tweeté la syndicaliste Linda Kebbab, balayant ainsi toute présomption d’innocence. (...)
Sur BFMTV, Jean-Christophe Couvy, du syndicat Unité SGP Police-FO, enfonçait le clou en affirmant que le groupe dont Souleyman faisait partie avait « mis le feu aux poubelles », avant d’être interpellé en flagrant délit pour une affaire supposée déjà « ficelée ».
Il foulait même un peu plus la présomption d’innocence en accusant l’étudiant de récidive (...)
... et le compte-rendu de sa garde à vue
D’après le compte-rendu de l’audition de sa garde à vue que s’est procuré Mediapart, Souleyman n’a jamais été accusé d’avoir incendié des poubelles et n’est jamais présenté comme porteur de briquet, de gel ou de cagoule. Les officiers de police judiciaire ont même présenté une vidéo à Souleyman lors de cette garde à vue, montrant qu’il n’avait pas incendié des poubelles.
« Les syndicats de police ont ensuite procédé à une véritable instrumentalisation de la procédure à des fins politiques. » Arié Alimi, avocat de Souleyman A. (...)
Trois heures après la publication de cet article dimanche, à 23 h 48, un bandeau de BFMTV annonçait encore à tort, mais selon « des sources concordantes » : « L’homme qui avait dénoncé les violences et les insultes de la BRAV-M a été interpellé vendredi. L’homme interpellé tentait de mettre le feu à une poubelle vendredi en marge d’une manifestation parisienne. »