
L’annulation d’une intervention de la philosophe Fabienne Brugère devant des évêques met au jour l’opposition entre progressistes et traditionalistes au sein de l’Église catholique en France.
Une censure qui passe mal. Fabienne Brugère, philosophe à l’université de Bordeaux-III, devait intervenir, mercredi 19 mars, dans le cadre d’une formation nationale des évêques consacrée à la famille. Mais une semaine avant, marche arrière : son intervention est annulée.
La raison ? La pression de milieux intégristes catholiques, qui voient en la philosophe une « idéologue du genre ». Mais, comme le relevait La Croix le 13 mars, « ses travaux n’entrent toutefois pas dans le champ des études de genre. La philosophe est l’une des spécialistes française du "care", mot anglais utilisé pour désigner la réflexion sur la place du souci pour autrui. » C’est sur ce seul thème - « Prendre soin de l’autre, un appel lancé à tous » - qu’elle devait intervenir devant les hommes d’Église.
"Pression d’une minorité érigée en police de la pensée"
L’évêque qui a choisi d’annuler sa venue justifie sa décision par le souci d’éviter « une crispation ». Mais cela n’a pas empêché de nouvelles crispations, justement Le même 13 mars, La Croix constatait dans un éditorial des « déchirements dans l’Eglise », observant que cette annulation « passe mal dans une partie de l’épiscopat, qui regrette une reculade sous la pression d’une minorité érigée en police de la pensée. » (...)
Interrogée par le blog « Digne de foi », du Monde, Fabienne Brugère dénonce elle aussi « le poids de ces courants ultra-traditionalistes » et espère que cette affaire « entraîne une prise de conscience, sinon l’Eglise cédera encore aux courants qui ne veulent ni de formation ni de dialogue, comme on l’a vu sur le mariage pour tous. »