
Les obsèques de Marcel Trillat (1940-2020) auront lieu au crématorium du Père-Lachaise, le 29 septembre. Retrouvons les combats de ce journaliste communiste, libre, généreux et scrupuleux, grâce au documentaire d’Yves Gaonac’h : Voix off.
(...) Adieux à un être exceptionnel, saisi de sanglots en évoquant le coup d’État de Pinochet au Chili et la mort de Salvador Allende, le 11 septembre 1973 ; vecteur d’union dans les luttes ; capable de transformer l’exercice journalistique en observation participante ; à la fois empathique et critique.
Oui, Marcel Trillat était un adorable homme d’acier, un tendre communiste irréductible, un curieux de ce qui naît empli de fidélité pour ce qui fut. (...)
Il a été happé par la télévision. D’abord filmé pour le magazine « Cinq colonnes à la une », en 1965, dans la ferme familiale reprise par sa sœur Marthe, Marcel Trillat répondit à l’invitation de Pierre Desgraupes de passer revoir l’équipe de tournage à Paris. Adoubé par « les papas » – ainsi nommait-on Pierre Dumayet, Pierre Desgraupes, Pierre Lazareff et Igor Barrère, qui animaient ce programme, qui devait être victime, comme tant d’autres, des purges gaullistes post-soixante-huitardes –, le jeune Marcel allait passer de l’autre côté de la caméra, comme du microphone.
Dès ses premiers entretiens, un talent journalistique et un tempérament humain se faisaient sentir, comme lorsqu’il s’attaque, en 1966, au « Canada français » – comme devait dire de Gaulle sur place l’année suivante –, à un homme capable de s’attaquer aux ours. C’était il y a cinquante-quatre ans, autant dire des siècles et des siècles… (...)
Près de vingt ans plus tard, alors que la gauche avait accédé au pouvoir avec l’élection de François Mitterrand à la présidence de la République, Marcel Trillat était revenu à la télévision, dont il avait été chassé. Une fois de plus, c’était Pierre Desgraupes qui lui avait mis le pied à l’étrier, au journal télévisé d’Antenne 2. Conscience du service public, Marcel Trillat allait être « placardisé », aussi bien par la droite (1986) que par la gauche (1991).
Dans le document d’archives ci-dessous, on a l’impression de revenir des siècles en arrière, tant la liberté de ton, le regard hugolien et l’ironie révoltée du journaliste Trillat (lancé par… Noël Mamère) tranchent d’avec le discours sécuritaire ayant gangréné le discours télévisuel : « Malheureusement, dans les prisons, il y a toujours des moutons », ose dire Marcel Trillat, ce 21 mars 1985… (...)
Voici donc Voix off, réalisé par Yves Gaonac’h, qui donne du cœur au ventre, en notre époque qui semble manquer de cœur et n’avoir plus rien dans le ventre. Avec des personnages et des professionnels comme Marcel Trillat, nous n’aurons jamais fini de croire au Temps des cerises… (...)