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Le Monde
« Pour nous, les morts en prison ne sont pas des anonymes »
Article mis en ligne le 8 juillet 2021
dernière modification le 7 juillet 2021

La surpopulation carcérale reprend de plus belle alors que les gouvernements successifs n’ont apporté que des réponses sécuritaires aux problèmes globaux soulevés par la délinquance, déplorent les membres et les soutiens du collectif Les Morts de la prison, dans une tribune au « Monde » qui est aussi un hommage aux détenus morts en 2020.

Rendre hommage aux personnes décédées, c’est, paradoxalement, célébrer la vie. Dans ses irrégularités, ses à-coups, ses emballements, son non-conformisme, sa violence. Toute personne, quoi qu’elle ait pu faire, conserve le droit que sa dépouille soit traitée avec respect et dignité. Nul ne doit être abandonné dans sa mort. Pour nous, les morts en prison ne sont pas des anonymes : à la confrontation des idées abstraites de la prison et de la mort nous préférons considérer que ces personnes auraient pu vivre une autre vie.

L’arrivée en prison est violente : 15 % des suicides ont lieu dans les dix premiers jours. Puis on s’habitue, ensuite on désespère ; les deux tiers des suicides surviennent dans les cent premiers jours de détention. Mais on meurt en prison aussi du fait des violences qui s’y produisent ou encore de « mort naturelle ». (...)

Dans ce dernier cas, ces décès sont souvent liés au manque de soins évident, en amont de la prison, de personnes souvent éloignées du système de santé. Ils peuvent aussi résulter de la découverte tardive d’une maladie grave. La prison n’est pas un lieu de soins et les chances de guérison n’y sont pas égales à celles des citoyens libres. Les effectifs de soignants sont insuffisants, du fait notamment de la surpopulation dans les établissements, de la surenchère sécuritaire qui y règne parfois.

Pas occulter la responsabilité citoyenne (...)

Ces vies, la prison les a gelées, anesthésiées et parfois tuées à petit feu. Les morts en prison induisent aussi des dommages collatéraux (...)

Nous constatons que le système carcéral augmente objectivement les risques chez les plus fragiles, et ce quel que soit leur âge. (...)

Les murs des prisons qui dissimulent ces morts ne doivent pas occulter la responsabilité citoyenne qui est la nôtre, ne serait-ce que parce que les peines sont prononcées « au nom du peuple français ». Nous préconisons que la mise en place de dispositifs de parole et d’écoute, théoriquement prévue, soit généralisée, tant pour les agents pénitentiaires que pour les personnes détenues qui ont connu la personne décédée. (...)