
Plus pauvres en argent mais plus riches en temps : est-ce le sens de l’histoire ?
Peut-être faites-vous partie des millions d’heureux Français qui, le 1er novembre, ont profité d’un jour férié. Vous ne vous en êtes sans doute pas alors rendu compte, du moins n’était-ce pas votre réflexion première, mais vous avez ce faisant contribué à votre manière à la lutte contre le changement climatique.
La semaine de quatre jours, vieux thème resurgissant ici et là, solution testée en Espagne et en Islande notamment ou envisagée dans le très laborieux Japon, pourrait ainsi, selon le Financial Times et l’auteur britannique Simon Kuper, être l’une des briques primordiales des bouleversements nécessaires pour sauver la planète. (...)
Prenant le contre-pied des vieilles antiennes productivistes, Kuper part d’un constat : présentée comme elle l’est actuellement, le concept de décroissance est un repoussoir pour des individus coincés dans un présent et une culture consumériste, menés par des politiques dont l’objectif cardinal est, in fine, une croissance du PIB à tout prix, et notamment celui d’une hausse des émissions de gaz à effets de serre.
Le Britannique constate également que, dans le cas de sociétés développées plutôt inégalitaires, une plus grande richesse générale ne profite pas au plus grand nombre et, surtout, que l’argent et un surplus de consommation qu’il permet ne contribuent que de manière marginale au bonheur. (...)
L’auteur note également qu’outre un manque permanent d’argent, nombre d’actifs ressentent un vif déficit de temps en dehors de leurs heures de travail. Des heures de travail qui, de surcroît, sont majoritairement malheureuses.
Le contre-sens de l’histoire (...)
Selon le Britannique, outre les bénéfices liés à la réduction des temps de transport, une semaine de quatre jours devra nécessairement s’accompagner de salaires plus bas.
Cette baisse de revenus sera nécessaire pour provoquer une baisse de la consommation de bien manufacturés, que compenseraient de fortes incitations pour des loisirs générant peu d’émissions de gaz à effet de serre –et, peut-être, plus de bonheur qu’une visite au centre commercial voisin le samedi après-midi.
À l’inverse, des pénalités financières pour tout ce qui va dans le sens du changement climatique, une forte surtaxe sur le transport par avion par exemple, pourrait permettre de réduire quelque peu les inégalités face au climat, et d’investir dans le verdissement des infrastructures et le bien commun.
« Pour arrêter le changement climatique, nous devons être plus pauvres, et le moyen le plus sûr d’y arriver est de travailler moins », écrit ainsi Simon Kuper dans le FT. Nos sociétés sont-elles prêtes à un tel changement de paradigme ? Rien n’est moins sûr.