
Alors que même la Chine et la Russie n’ont pas utilisé leur véto, ce choix place la diplomatie allemande dans une position singulière en Europe, sur fond de débat sur l’avenir de l’armée de la république fédérale
La Bundeswehr, fondée en 1955 dans un contexte profondément antimilitariste, a en effet un mandat très restrictif, inscrit dans la loi fondamentale : défendre le territoire allemand contre les agressions extérieures. Toute intervention qui s’écarte de ce mandat suscite de nombreuses vagues de protestations.(...)
Quand l’Allemagne, avec un gouvernement alliant socialistes et écologiste, a participé aux opérations au Kosovo en 1995, elle a dû faire face à une immense opposition parmi la population, toutes tendances politiques confondues. L’idée d’une intervention militaire est donc à manier avec précaution ici. "Pour nous, il est toujours impossible d’évaluer les risques d’un tel engagement. En Irak, la mise en place en place d’une zone d’exclusion aérienne pour protéger les populations kurdes s’est soldée par un fiasco. On ne peut jamais être certain de ne pas déclencher une guerre civile.(...)"
une réaction en chaine est possible. Pour nous, l’exemple de l’Afghanistan fonctionne comme un repoussoir : on était parti pour une guerre rapide, et aujourd’hui, on se retrouve dans un conflit mondial, avec un accompagnement militaire des réformes… Et un bourbier dont plus personne ne sait comment s’extraire(...)
Vue d’Allemagne, la Libye est une terre lointaine. Depuis que la crise fait la une des médias, nous sommes désespérément à la recherche d’experts de la Libye : sur tout le territoire allemand, on n’en compte que deux ! (...)
On se pose aussi des questions sur la vraie raison de l’intervention en Libye. A-t-elle vraiment lieu au nom des droits de l’homme ? Dans ce cas, pourquoi choisir la Libye ? Et pas la Côte d’Ivoire ? Le Zimbabwe ?
Où doit-on commencer par attaquer ? Il est de notoriété publique que les Etats ne mettent en branle leur puissance militaire que quand leurs intérêts directs sont en jeu… Ce n’est pas les gentils d’un côté et les méchants de l’autre…(...)
Depuis l’Allemagne, nous estimons que Sarkozy règle aussi des problèmes de politique intérieure avec la crise libyenne. Son taux de popularité catastrophique dans les sondages, le jeu trouble de la France lors des révolutions tunisienne et égyptienne… La Libye, c’est aussi une belle occasion d’apparaître comme un défenseur des droits de l’homme. (...)