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Pratique de l’humanitaire : pour rompre avec l’hégémonie occidentale
Article mis en ligne le 22 mars 2012
dernière modification le 19 mars 2012

L’aide humanitaire non gouvernementale est dominée par un modèle d’organisation, des financements et une visibilité opérationnelle qui l’identifient clairement comme issue des pays occidentaux. Pierre Micheletti, ancien président de Médecins du monde, démontre ici que pour être en phase avec les nouvelles réalités internationales, ce modèle doit évoluer et s’adapter. Le prix à payer est une certaine forme de « désoccidentalisation ». Cela ne signifie ni un reniement, ni un travestissement, mais une mixité des hommes et des savoirs librement consentie par les acteurs de la solidarité internationale.

(...)« Pratique de l’action humanitaire et nouvelle gouvernance des ONG, pour rompre avec l’hégémonie occidentale ». Celui qui est à l’origine de ce master et du thème choisi, est précisément celui qui m’a devancé dans la salle, le Pr. Esoh Elamé, universitaire camerounais, par ailleurs enseignant à l’université Ca’ Foscari de Venise. L’enseignement du CA2D est ainsi le fruit d’un partenariat entre les deux universités.

Mes hôtes souhaitent que je mette à profit la semaine qui commence pour travailler avec les étudiants le concept de nécessaire « désoccidentalisation » de l’action humanitaire internationale.

Pourtant, en France le néologisme ne fait pas florès. Le terme dérange. Il fait figure de barbarisme, à commencer par la difficulté phonétique à le prononcer…Mais les réticences sont plus profondes, plus enracinées. Le terme heurte ceux qui l’entendent comme une remise en cause des valeurs humanistes et universalistes héritées du siècle des Lumières. (...)

On regroupe cependant sous le même label d’ONG des organisations dont les champs de compétences sont très variés (santé, agriculture, droits de l’Homme…), dont l’inspiration idéologique n’est pas homogène (confessionnelles ou non…), dont la taille varie, des plus connues qui sont de vraies organisations transnationales, à la constellation des petites ONG (qui ne comptent parfois qu’un seul permanent).

Mais surtout, dans ce qui les distingue, domine une question politique majeure  : les ONG entretiennent avec l’Etat de leurs pays d’origines des relations très variées. On peut distinguer de ce point de vue trois grandes familles d’ONG [4].
(...)

de l’Afghanistan à l’Irak, de la Corée du Nord à Haïti, de la Somalie aux pays du Sahel, du Darfour à la Syrie, les exemples se succèdent qui nous encouragent à questionner et à analyser les difficultés, voire les impossibilités, à agir sur des terrains de plus en plus vastes
(...)

« Désoccidentaliser » ne signifie pas tomber dans un culturalisme caricatural et dangereux, mais sortir d’une situation de monopole. Chercher des partenaires et des alliés en dehors des pays occidentaux. Chercher des ressources humaines, financières et techniques là où elles se trouvent aujourd’hui, dans des pays comme l’Inde, l’Afrique du Sud, le Brésil... (...)

« Désoccidentaliser » l’aide humanitaire, c’est aussi sortir de la logique des intérêts des grandes puissances occidentales dont elle peut, en certaines circonstances, apparaître comme l’éclaireur masqué ou la voiture balai. Ce qui impose de réaffirmer encore et toujours son caractère non-gouvernemental. Cet impératif n’est manifestement pas partagé dans la constellation des ONG, car il suppose une émergence sans concession du modèle « méditerranéen », plus contestataire vis-à-vis des pays d’origine. Cette émergence est pourtant loin d’être acquise aujourd’hui.
(...)

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