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Mediapart
Présidentielle : Macron spamme les directeurs d’école à 48 heures du premier tour
Article mis en ligne le 9 avril 2022

Les équipes de campagne du président-candidat ont procédé, vendredi 8 avril, à un envoi massif de mails ciblant les directeurs d’écoles sur leurs adresses professionnelles pour les appeler à voter Macron. Une manœuvre qui suscite la colère d’une partie du corps enseignant.

(...) Originalité de la démarche : le mail a été envoyé sur les adresses professionnelles des chef·fes d’établissement, comme Mediapart a pu le vérifier. « Transmettez ce message à vos collègues ! », conclut même le message, comme s’il s’agissait d’une consigne du rectorat.

L’envoi de cette propagande électorale a rendu furieux plusieurs de ses destinataires. Sur Twitter, la section parisienne du SNUipp-FSU (Syndicat national unitaire des instituteurs et professeurs des écoles) a dénoncé les manœuvres d’un président-candidat qui « tente de récupérer les enseignant·es en envoyant un mail de propagande aux directeur·trices qu’il a tant meprisé·es ». « Outre le fait que le contenu n’a pas de sens pour les écoles, qu’en pense l’académie de Paris ? », se demande aussi le syndicat. (...)

La diffusion ne s’est pas limitée à la seule académie de Paris, selon nos informations. L’envoi massif a été réalisé à partir des bases de données de l’entreprise spécialisée EMB, qui travaille avec plusieurs entreprises du CAC 40 (Renault, PSA, Orange). Contactée, l’équipe de campagne d’Emmanuel Macron confirme être à l’origine de ce message « dirigé vers un public professionnel du monde de l’éducation ». Elle a fait appel à un sous-traitant pour obtenir des adresses ciblées. (...)

Sur son site internet, la Cnil (Commission nationale de l’informatique et des libertés) « recommande » toutefois, dans le cas de l’utilisation de fichiers commerciaux, que chaque candidat et candidate s’assure que les personnes concernées « aient au préalable consenti de manière spécifique à la possible utilisation de leurs données à des fins de communication politique ».

Si plusieurs directeurs et directrices s’étonnent d’avoir ainsi reçu de la propagande électorale, l’équipe de campagne d’Emmanuel Macron assure que « tout est bien conforme aux règles juridiques en vigueur (Cnil, RGPD) ». Cette confusion entre adresses professionnelles et campagne politique n’est pas sans rappeler le mélange des genres autour de la création d’Avenir lycéen. (...)

Emmanuel Macron connaît pourtant la colère du corps enseignant. Une colère qui est allée croissant tout au long du quinquennat, se cristallisant d’abord sur Jean-Michel Blanquer, avant de rattraper, ces derniers temps, le président-candidat. Son projet de libéralisation de l’école, esquissé à Marseille (Bouches-du-Rhône), puis confirmé sur l’ensemble du territoire, n’est pas franchement de nature à rassurer le personnel de l’Éducation nationale et ses représentants syndicaux, de la CGT Éducation au Snalc.

Outre ce chantier, c’est la question de la rémunération des enseignant·es qui inquiète ou plus exactement la réponse qu’y a apportée Emmanuel Macron, en conférence de presse, le 17 mars. « Ce que je souhaite faire pour les enseignants qui sont en place, c’est leur proposer en quelque sorte un nouveau contrat, où on augmente et on est prêt à augmenter substantiellement la rémunération, s’ils sont prêts à aller vers [de] nouvelles missions, et à changer leur organisation et leurs règles d’engagement », a-t-il dit. (...)

Dans un entretien accordé récemment au Figaro, Emmanuel Macron a encore franchi un pas supplémentaire en affirmant vouloir « répondre au syndrome de la salle des profs, où celui qui se démène est parfois moqué par celui qui fait le minimum syndical ». Une façon de cliver le corps enseignant, comme il a tenté de le faire sur bon nombre d’autres secteurs professionnels, dès lors qu’il s’agissait de faire passer une réforme socialement contestée – celle de la SNCF ou celle des retraites.