Bandeau
mcInform@ctions
Travail de fourmi, effet papillon...
Descriptif du site
le Monde Diplomatique
Quand l’Afrique réinvente la citoyenneté locale
Mamadou Bachir Kanoute
Article mis en ligne le 6 octobre 2011
dernière modification le 3 octobre 2011

Dans les villes africaines, en cours de paupérisation, de nouvelles pratiques sociales bousculent les rapports de pouvoir.

C’est en Afrique que la mise en commun des ressources en vue de l’action publique est la plus faible. Nulle part les prélèvements fiscaux et parafiscaux n’y excèdent les 17 % du produit intérieur brut (10 % en général), alors qu’ils se situent par exemple aux environs de 20 à 25 % en Amérique latine, et de 40 à 50 % dans les pays occidentaux.

Les dépenses des collectivités locales africaines ne représentent pas plus de 3,5 %des budgets publics. En outre, elles sont consacrées à 80 voire 85 % aux frais de fonctionnement (salaires des agents municipaux, carburant, etc.), ne laissant qu’une très faible portion à l’investissement de base (éducation, santé, eau, assainissement, etc.) et à la satisfaction de la demande sociale (sécurité, insertion socio-économique, entre autres).

Cependant, depuis la démocratisation du continent dans les années 1990, les populations s’impliquent de plus en plus dans la gestion de leurs cités. C’est ainsi que le budget participatif est apparu en Afrique au début des années 2000. (...)

le mouvement s’étend progressivement à tout le continent. Au Cameroun, une cinquantaine de villes sont impliquées. En République démocratique du Congo (RDC), six municipalités dont les bourgmestres sont pourtant nommés par l’Etat central sont en train d’expérimenter le budget participatif déjà effectif dans la capitale Kinshasa et dans le Sud-Kivu. En Afrique anglophone, c’est l’Afrique du Sud et le Kenya qui font figure de moteurs. Le Mozambique et le Cap-Vert, avec six villes, rejoignent le mouvement en Afrique lusophone.

L’approche du budget participatif permet une meilleure allocation des ressources communales aux besoins essentiels des populations, surtout les plus défavorisées.
(...)

C’est ainsi qu’à Madagascar les entreprises d’extraction minière ont été contraintes de rendre publiques les redevances qu’elles versent à l’Etat. Les ressources financières ainsi récupérées ont été consacrées aux besoins en salles de classe, en postes de santé et, d’une manière générale, à une meilleure prise en charge des Objectifs du millénaire pour le développement.

Dans les villes africaines, souvent marquées par une rupture de la cohésion sociale, l’approche du budget participatif favorise l’équilibre entre les quartiers centraux, qui sont considérés comme une vitrine et qui font l’objet de toutes les attentions des autorités, et les quartiers périphériques surpeuplés. (...)

Au plan politique, le budget participatif accroît la transparence de la gestion municipale. Celle-ci acquiert par ce biais une plus grande crédibilité aux yeux des populations.
(...)

Pour autant, l’institutionnalisation des processus de budgétisation participative reste un défi. A Madagascar, après une expérimentation dans neuf communes pilotes, le gouvernement encourage l’extension du processus à cinquante communes pour l’exercice 2011 et prévoit de le généraliser dans trois cents communes en 2012. Au Sénégal, le ministre de la décentralisation et des collectivités locales s’est prononcé en faveur du vote d’une loi ; au Mozambique, des lignes directrices sont élaborées par le gouvernement pour la modélisation de la budgétisation participative.

En effet, dans la majorité des pays, la législation est en retard sur les pratiques. (...)

Enfin, l’un des défis majeurs reste le suivi et l’évaluation des expériences engagées. Le cloisonnement des initiatives, souvent liées à des microprojets ad hoc non coordonnés, ne facilite pas ce processus. Il apparaît nécessaire de renforcer les échanges entre pays africains et entre l’Afrique et le reste du monde.
(...)

.