Des scientifiques se sont fait une spécialité d’analyser le lien possible entre les événements météo extrêmes et le réchauffement climatique. Décrié au départ, leur travail est devenu crédible
Quand une poignée de scientifiques tente en 2015 d’évaluer le rôle du changement climatique dans les inondations record au Royaume-Uni, l’accueil est glacial et la démarche qualifiée de « non scientifique ». Six ans plus tard, leur travail est devenu crédible.
Début juillet, les scientifiques du World Weather Attribution a estimé que le changement climatique a rendu la vague de chaleur qui a frappé en juin l’ouest des Etats-Unis et du Canada au minimum 150 fois plus susceptible de se produire.
Le World Weather Attribution (WWA), qui regroupe des experts de divers instituts de recherche dans le monde, s’est fait une spécialité d’analyser le lien possible entre un événement météo extrême précis et le réchauffement climatique, en calculant dans des délais très courts la probabilité qu’il se soit produit même sans le dérèglement climatique lié aux émissions de gaz à effet de serre.
« Nous voulions faire évoluer le débat, mais nous ne pensions pas que cela fonctionnerait aussi bien », explique la climatologue Friederike Otto de l’université d’Oxford, qui a créé le WWA en 2014 avec Geert Jan van Oldenborgh, du Royal Netherlands Meteorological Institute, décédé d’un cancer le 12 octobre. (...)
Le WWA a mis au point une méthodologie validée par d’autres experts et a montré que l’attribution rapide d’une catastrophe naturelle au changement climatique est « une activité opérationnelle », commente Robert Vautard, chercheur au Laboratoire des Sciences du climat et de l’environnement (LSCE).
« Vous ne publiez pas une étude à chaque fois que vous faites une prévision météo », explique à l’AFP le climatologue, qui participe aux travaux du Giec. Mais lors de la vague de chaleur au Canada et aux Etats-Unis, les températures ont été « hors échelle », poursuit-il.
Située à 250 km de Vancouver dans l’Ouest canadien, la localité de Lytton a enregistré pendant trois jours consécutifs un record, jusqu’à atteindre 49,6°C avant d’être détruite à 90 % par les flammes, qui ont tué deux personnes.
Selon les travaux du WWA, avec le climat actuel, une telle vague de chaleur pourrait statistiquement avoir lieu une fois tous les 1 000 ans. Les chercheurs avaient par ailleurs déterminé que les températures enregistrées ont été environ 2°C plus élevées qu’elles l’auraient été si cet épisode de chaleur extrême avait eu lieu au début de la révolution industrielle.