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Basta !
Quand un atelier haute-couture 100% coopératif résiste aux délocalisations
Article mis en ligne le 25 septembre 2013
dernière modification le 20 septembre 2013

Que faire face à la crise et aux délocalisations de l’industrie textile ? Lorsque les usines sont transférées vers la Tunisie, le Bangladesh ou la Chine ?

En 2010, après un plan social et une liquidation judiciaire, les ateliers de l’entreprise Lejaby ferment les uns après les autres. En 2012 est créée la coopérative « Les Atelières », qui embauche d’anciens salariés de Lejaby pour la fabrication de lingerie haut de gamme. Reportage à Villeurbanne (Rhône), où les débutantes et les anciennes salariées apprennent à travailler ensemble, et à faire vivre une entreprise pas comme les autres. (...)

Ici, pas de travailleuses uniformément courbées sur leurs machines, les dents serrées pour respecter la cadence, ni de monceaux de marchandises fabriquées en série. Aux Atelières, on produit en petites quantités des pièces « parfaites », et on prend le temps qu’il faut pour ça. A la coupe, des gabarits de culottes attendent que la lame de la scie soit réparée. Un peu plus loin, concentré sur son ouvrage, un homme fixe une à une de minuscules fleurs pastel sur le tissu d’un string, tandis que de jeunes ouvrières papotent tout en coupant les derniers fils qui dépassent, et emballent avec soin des soutiens-gorges de la nouvelle collection « Couture » de la Maison Lejaby, l’un des principaux clients de la coopérative (après la liquidation judiciaire, un repreneur a relancé une partie de l’activité de l’entreprise Lejaby). (...)

Les ouvrières ont suivi une formation très spécifique, conçue sur mesure par Laura Gandolfi, syndicaliste et retraitée de l’Institut national des sciences appliquées (Insa). « Les filles ont une vision complète du produit », s’enthousiasme Nicole. « Dans nos ateliers, on subissait. Là, tout le monde participe et pose des questions. » Le savoir-faire de la coopérative et la possibilité d’afficher du Made in France ont convaincu une poignée de grandes marques (Lejaby, Agnès B, Zahia...) et quelques jeunes créateurs de lui confier des collections.

Derrière les machines et dans les bureaux, souffle un léger vent d’optimisme : le carnet de commandes est plein jusqu’à l’automne et l’équipe a trouvé un rythme de production acceptable. Muriel ne se laisse pourtant pas aller à une confiance excessive. « Quand on a commencé en janvier, j’ai dit : "C’est au bout d’un an qu’on saura si on est morts ou vivants." »


Des milliers de personnes ont répondu à l’appel à souscription

Huit personnes, dont six salariés et anciens salariés de Lejaby, se sont risquées dans cette aventure « à contre-courant » et se sont associées à Muriel Pernin au sein d’une Société coopérative d’intérêt collectif (Scic). Les associés se sont appuyés sur un noyau de couturières expérimentées (...)

Autre défi pour la coopérative, et pas des moindres : il lui faut trouver un mode de production adapté aux petites quantités – les seules à échapper aujourd’hui à la délocalisation. « Chaque modèle, qui a ses fils et ses réglages particuliers, compte au maximum quelques centaines de pièces à décliner dans différentes tailles », explique Muriel. « Le problème est que l’appareil industriel est fait pour gérer de grandes quantités. Nous avons un partenariat avec l’Insa qui doit nous aider à trouver le meilleur fonctionnement. Cela pourrait servir aussi à la maroquinerie, la ganterie, la bijouterie... On est dans l’innovation totale. Je me bats pour qu’on soit reconnu comme atelier expérimental. » (...)

La confection locale sera-t-elle désormais réservée aux riches ? Nicole veut croire que non. « Le luxe sera un tremplin pour faire revenir la production sur le moyen et haut de gamme », espère-t-elle. (...)