
Évoquons-le d’emblée : il existe un grand nombre de raisons pour rejeter cette notion de « bientraitance » qui, telle une traînée de poudre douceâtre, s’est répandue à grande vitesse ces derniers mois dans le milieu gérontologique....
...Les politiques jouent un jeu dangereux : en demandant toujours plus, sans les moyens de le faire, ils participent à l’accroissement d’une certaine forme de souffrance psychique, qui naît du décalage croissant entre ce que les professionnels aimeraient faire et ce qu’ils peuvent faire. Les formations, les écrits, sur la bientraitance comme sur le prendre-soin, d’ailleurs, aussi passionnants soient-ils, entretiennent parfois ce risque....
...à chaque fois que sont enseignées des recettes, des techniques censées être valables pour tout le monde en tout lieu et en tout temps, des recettes et techniques ne reposant pas sur l’autonomie des professionnels, sur leurs capacités de réflexion et d’ajustement, les résultats sont caricaturaux : soit ces recettes et techniques sont rapidement abandonnées, soit elles sont utilisées rigidement et susceptibles alors de faire autant de mal que de bien...
...aucun principe, aucune philosophie, aucune éthique, aussi riches soit-ils, ne peuvent améliorer le prendre-soin s’ils ne servent pas l’autonomie de celui qui les utilise, si’ils font pas l’objet d’un chemin, individuel et collectif, ouvert au doute et à l’interprétation....
...Autonomie et pensée (critique) : autant de facultés que ceux qui présentent la bientraitance comme une recette politique magique n’ont qu’exceptionnellement souci de développer chez les professionnels et les usagers.....
...On peut défendre la conviction qu’au fur et à mesure qu’ensemble, usagers, proches et professionnels, défendront de manière autonome et argumentée leurs besoins – en moyens comme en formations – en s’appuyant sur ces éléments nécessaires au développement d’une culture de la bientraitance, il sera de plus en plus difficile à ceux qui prétendent qu’on peut bien prendre-soin dans la pénurie de continuer à nous faire prendre des vessies pour des lanternes, des mots pour des actes et des discours pour des politiques..