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Le Monde
Reportage Au Cameroun, on fabrique des pavés « écolos » à partir de déchets plastiques
Article mis en ligne le 20 septembre 2016
dernière modification le 14 septembre 2016

« La première fois que mes amis m’ont vu fouiller dans une poubelle, ils ont cru que je devenais fou, se souvient hilare, Robert Tedonfo. Ils ont couru avertir ma tante qui est venue, pagne noué aux hanches, vérifier de ses propres yeux. » Patiemment, le jeune homme âgé de 26 ans, tente alors de lui expliquer ce qu’il fait : collecter des emballages et des bouteilles plastiques dans les poubelles de Yaoundé, capitale du Cameroun, pour en faire des pavés « écolos », utiles pour la construction de routes et de maisons.

Avec une durée de dégradation estimée entre 500 et 1 000 ans, les déchets plastiques constituent selon des statistiques, 10 % des six millions de tonnes d’ordures produites chaque jour sur le territoire camerounais. Depuis avril 2014, le gouvernement a interdit la fabrication, l’importation, la commercialisation et l’utilisation des emballages plastiques non-biodégradables de moins de 61 microns sur l’ensemble du territoire national. Plusieurs centaines de tonnes ont ainsi été saisies depuis l’interdiction. (...)

Malgré la mise en place des brigades opérationnelles chargées de saisir ces emballages non conformes et d’interpeller les fautifs, la contrebande alimente le marché noir. Sans plan de recyclage, le gouvernement peine à trouver des solutions. Cependant, quelques jeunes comme Robert tentent « de dépolluer leur environnement ».

Au « laboratoire », le jeune homme a été rejoint par « son unique collègue qui est resté. » Elvis Kwambissa est un enfant de la rue qui « rêve de faire du recyclage des déchets plastiques, un vrai boulot ». En un an, les deux jeunes hommes, venus en tant que stagiaires, avec une vingtaine d’autres, sont les seuls qui poursuivent l’aventure au sein de cette fabrique mise sur pied par la fondation « Cœur d’Afrique », de l’ancien international camerounais, Roger Milla, pour aider les jeunes défavorisés à apprendre un métier.

« C’est l’heure des bouteilles » (...)

D’après des résultats du laboratoire du génie civil camerounais, ces pavés sont trois fois plus résistants que ceux qui sont faits à base de ciment : ils peuvent supporter jusqu’à 50,5 tonnes de charge. « Les autres ne supportent qu’entre six et douze tonnes, assure Pierre Kamsouloum, consultant formateur en technique de recyclage des déchets plastiques et directeur technique de la fondation Cœur d’Afrique, qui observe avec satisfaction le travail de ses protégés. Le prix du mètre cube de nos pavés, qui comprend entre 26 et 33 pavés, varie entre 4 000 et 4 500 FCFA [environ 6,5 euros] au lieu de 5 000 à 25 000 [jusqu’à 38 euros] comme les autres. »
« Rendre ma ville plus propre »

« Ce travail me comble de joie car il permet de rendre ma ville plus propre et d’aider la population, se réjouit Robert, orphelin de père. Lorsqu’il y a des commandes, on peut fabriquer plus de 300 pavés par jour que nous livrons aux particuliers. » Mais, peu connus du grand public, les commandes sont encore sporadiques. (...)