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Retraites : Europe 1 en tenue de combat
Article mis en ligne le 19 janvier 2020
dernière modification le 18 janvier 2020

Tout au long du mois de décembre et au-delà, Europe 1 a sonné la mobilisation générale pour défendre le projet de réforme des retraites du gouvernement, et pour pilonner opposants et grévistes.

Le 7 décembre, dans son émission « Médiapolis », Olivier Duhamel affirme avec assurance que les médias dominants ont tiré les enseignements de 1995 : « En 1995, tous les médias, les commentateurs encensaient le plan Juppé. Et c’était très, très, très marginal, ceux qui le critiquaient et ceux qui ne critiquaient pas le mouvement. Là, c’est exactement l’inverse [sic]. C’est-à-dire qu’on souligne l’incohérence du gouvernement, l’illisibilité de la réforme, on ne dit pas de mal, on est factuel dans la description du mouvement. […] Je pense que c’est la prise de conscience dans les élites médiatiques, de la distance révélée entre le haut et le bas, des critiques dont ils étaient l’objet. »

Au comble de l’aveuglement, l’éditocrate récidive le 4 janvier en saluant le « souci d’équilibre » et le « respect de l’exposition des différents points de vue » sur Europe 1, paraphrasé par Sonia Mabrouk, qui honore quant à elle « l’équilibre et l’harmonie » de la station. Nous leur donnons raison sur un point : à l’antenne de la station d’Arnaud Lagardère, la défense de la réforme et le pilonnage des grévistes rythment une ligne éditoriale à l’unisson, sans qu’aucune fausse note ne vienne entacher la partition.

Parmi les éditorialistes et animateurs d’Europe 1, pas une voix dissonante ne semble trouver sa place. Au fil des émissions, qu’il s’agisse de la matinale, de « Médiapolis », du « Grand Entretien », du « Grand rendez-vous » ou encore du « Grand journal du soir », le discours est simple comme bonjour : la réforme est inévitable voire souhaitable ; les cheminots sont des enragés et prennent les commerçants en otage, « majorité silencieuse » dont Europe 1 se fait la porte-parole ; les syndicalistes sont au banc des accusés et les grèves ont des impacts psychologiques graves sur les usagers. Reprenons point par point.

« Il n’y a pas d’alternative » (...)

« De toute façon la réforme passera ». Le mot d’ordre est assené jour et nuit sur les ondes de la radio : (...)

Et lorsqu’ils doivent apporter la preuve qu’ « aucune alternative » n’est possible, les éditocrates d’Europe 1 rivalisent d’arguments pour exclure du périmètre médiatique tout ce qui ne leur semble pas… réaliste (ce qui fait beaucoup de choses). (...)

Puisque à l’antenne d’Europe 1 animateurs et éditorialistes sont tous d’accord sur le fond, ne reste plus qu’à commenter la « méthode » du gouvernement. Et là encore, ils sont au diapason, qu’il s’agisse de répéter à l’envi que la réforme a été « mal expliquée » (...)

Rien n’arrête le discours anti-gréviste

Autre motif récurrent dans la partition d’Europe 1 : le recadrage systématique des contestataires pour leur prétendue intransigeance coupable et leur responsabilité dans les « galères ». Il va de soi que certaines actions de grévistes contreviennent aux règles de la contestation fixées par les gardiens de la bienséance médiatique : la grève d’accord… mais à condition qu’elle ne gêne personne ! (...)

Cette mise au banc des accusés se retrouve aussi bien dans les interrogatoires musclés des grévistes et opposants que dans les réquisitoires des éditocrates. Et en la matière sur Europe 1, c’est un véritable festival. (...)

Le matraquage à l’encontre des grévistes n’a d’égal que la solidarité de circonstance qu’expriment tous les éditorialistes vis-à-vis de toute personne (ou presque…) impactée par la grève. (...)

Partis-pris incessants, violence et mépris assumés, suivisme vis-à-vis du gouvernement et disqualification systématique de toute proposition politique alternative… Après plus d’un mois d’observation, le constat est sans appel : celui d’un traitement médiatique à sens unique. Et qui n’a l’air d’inquiéter personne au sein des instances « régulatrices » censées veiller au respect du pluralisme.