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CQFD
Revenu inconditionnel, késako ?
Article mis en ligne le 9 décembre 2014
dernière modification le 4 décembre 2014

CQFD : Quelle différence faire entre revenu garanti, revenu minimum, revenu socialisé (contrats aidés), revenu universel et revenu inconditionnel ?

Baptiste Mylondo [1]  : Il existe en effet une confusion entre plusieurs propositions alternatives ou concurrentes. Elles peuvent répondre à diverses formulations (parfois les mêmes, pour ajouter à la confusion), partager certaines caractéristiques communes (l’inconditionnalité par exemple, même si elle n’est pas toujours entendue de la même manière…) mais elles se distinguent souvent par les montants avancés, les modalités de versement envisagées, les bénéficiaires retenus, le fondement adopté, ou parfois même la conception de l’inconditionnalité défendue.

Je me limiterai à trois exemples. Personnellement, je préfère le revenu « suffisant », qui précise le critère de détermination du montant, au revenu « minimum » ou au revenu « de base » qui n’en disent rien et n’excluent surtout pas un revenu insuffisant. De même, je préfère le revenu « de citoyenneté » (formule que j’emploie parfois), condition de la participation effective des citoyens à la vie sociale, au revenu « citoyen » de Villepin par exemple, conditionné par la nationalité. Je préfère enfin le revenu « inconditionnel », comme son nom l’indique, à un revenu « garanti » versé sous condition de ressources (principe de « l’inconditionnalité faible »).

Mais parce que l’appellation ne dit pas tout, il convient de préciser ce que l’on entend par revenu inconditionnel et pourquoi on le défend. Pour ma part, je milite pour un revenu versé sans condition ni contrepartie, à tous les membres d’une communauté politique donnée (les résidents si l’on prend l’échelle nationale), et d’un montant suffisant pour pouvoir être à l’abri de la pauvreté, accéder aux biens et services jugés essentiels et se passer durablement d’emploi. Concernant le pourquoi, c’est la double question du fondement (en quoi est-ce juste ?) et de l’objectif (pourquoi est-ce souhaitable ?). De mon point de vue, le revenu inconditionnel doit venir reconnaître, permettre et encourager la contribution de tous à la richesse sociale, et il doit permettre, entre autres bienfaits, de remettre en cause le culte de l’emploi, l’addiction au turbin, la folie de la croissance et ­l’exploitation capitaliste. C’est dans cette optique que je le défends. (...)

Quel lien établir entre revenu inconditionnel et décroissance ?

Aujourd’hui nous sommes pris dans un cercle vicieux qui nous pousse à bosser trop, pour consommer trop, pour bosser trop, etc. C’est la conséquence directe de la « valeur travail » (la survalorisation sociale de l’emploi) et de l’impératif de croissance. Mon espoir est que la mise en place d’un revenu inconditionnel nous permette de sortir de cette logique absurde et nous conduise à une décroissance qui doit être une décroissance de notre mode de vie autant qu’une libération de notre temps. L’enjeu est de poser enfin la question du « suffisant » (et donc, incidemment, la question du « trop ») au lieu de viser maladivement le « toujours plus ». (...)