Bandeau
mcInform@ctions
Travail de fourmi, effet papillon...
Descriptif du site
France 24
Sans-papiers : des associations dénoncent la hausse des placements en rétention
Article mis en ligne le 6 juillet 2015
dernière modification le 4 juillet 2015

Dans un rapport rendu public mardi, des associations de défense des droits des étrangers dénoncent l’augmentation en France du nombre de sans-papiers placés en rétention. Un "enferment massif" qui tend à se banaliser, fustigent-elles.

Voilà un titre dont la France peut difficilement s’enorgueillir. En quelques années, l’Hexagone est devenu le champion d’Europe des placements en rétention administrative. Dans un rapport rendu public mardi 30 juin, cinq organisations de défense des droits des étrangers* indiquent en effet que "la France a eu recours à l’enfermement administratif de manière plus systématique que ses voisins européens".

De fait, entre 2003 et 2008, "le dispositif de la rétention a doublé et n’a pas diminué depuis lors", indiquent les associations. En 2013, sur le territoire français, près de 45 500 étrangers sans papiers ont été placés dans des centres ou locaux de rétention dans l’attente d’une procédure d’éloignement. Un chiffre qui plaçait alors la France loin devant l’Espagne (9 020), la Belgique (6 285), l’Allemagne (4 309) et l’Angleterre (2 571). "La rétention doit être une exception, or il y a une banalisation de cette situation", a déploré mardi Pierre Henry, directeur général de France terre d’asile, lors d’une conférence de presse commune avec les organisations associées.

À Mayotte, des conditions de rétention "indignes" (...)

"En métropole, une personne sur deux est expulsée sans être passée devant un juge des libertés, commente Jean-François Ploquin, de France réfugiés-Cosi. Si on compte Mayotte, trois quarts des expulsions sont menées sans aucun contrôle juridictionnel." Sur ce territoire d’outre-mer, près de 20 000 sans-papiers, pour la plupart venus des Comores voisines, ont ainsi été placés en rétention sans pouvoir bénéficier de leurs droits fondamentaux. (...)

Outre la hausse des rétentions, les organisations dénoncent l’augmentation de la durée moyenne de l’enfermement (passée à 12,3 jours en 2014 contre 10 jours l’année précédente), ainsi que celle du nombre de mineurs placés. "La volonté d’enfermer et d’expulser prime sur le respect des droits des personnes vulnérables", observe Marie Lindemann, de l’Association service social familial migrants (Assfam). Bien qu’en 2012, la Cour européenne des droits de l’Homme ait condamné la France sur ce point, près de 5 700 enfants ou adolescents ont séjourné dans des centres l’an passé, soit une hausse de 57 %. (...)

Les auteurs du rapport jugent cet "enfermement massif" d’autant plus préjudiciable qu’il est souvent accompli "non par pour expulser du territoire, mais pour disperser des populations étrangères et précaires". À Calais et à Paris, les autorités françaises ont démantelé l’an passé plusieurs camps desquels 700 migrants venus d’Érythrée, d’Afghanistan, du Soudan ou du Pakistan ont été chassés. Près de 260 d’entre eux ont été placés dans des centres de rétention. Or, 82 % ont finalement été libérés. "L’objectif des autorités laisse donc peu de doutes : éloigner pendant quelques jours ces migrants des régions concernées", affirme le rapport.

À en croire les organisations, la politique d’enfermement et d’éloignement répond à une logique du chiffre. (...)

"Inutile, parfois même absurde, et entachée de nombreuses violations des droits", la pratique de l’enfermement doit faire l’objet de profondes réformes, militent les associations du rapport. Or, le projet de loi relatif aux droits des étrangers que l’Assemblée nationale doit discuter en juillet ne prévoit pas de modifier les dispositions de la loi Besson de 2011, pourtant décriées par l’actuelle majorité.

"En Europe, et notamment en France, on doit rompre avec ce schéma de pensée unique qui est celle de l’enfermement. Il plane toujours une suspicion sur les personnes en voie de reconduite, comme s’il existait systématiquement un risque de fuite", constate Lucie Feutrier-Cook, de l’Ordre de Malte. Pour les organisations, il existe pourtant des alternatives que les États ne prennent peu ou pas le temps d’étudier. (...)