
Parce qu’écouter la jeunesse c’est bien, mais travailler avec elle et appliquer ce qu’elle demande c’est mieux. Sauver les enfants pour sauver le monde, mode d’emploi.
C’est fait, la calotte glaciaire du Groënland vient d’atteindre le point de non-retour. Même si l’humanité parvient à endiguer le changement climatique dans les années qui viennent, elle ne pourra plus sauver cette partie de la banquise. C’est terminé.
Une nouvelle qui passerait presque inaperçue au milieu de cet été caniculaire. Un de plus. Mais qui, pourtant, est une alarme sans précédent : quoique l’on puisse faire désormais, les conséquences de l’action humaine sur la planète sont, pour partie, irréversible.
Et ça, les enfants le savent. C’est leur futur qui est en jeu. C’est le monde dans lequel ils vivront d’ici quelques années. Et quand ils auront enfin l’âge de réparer ce qui a été aujourd’hui cassé, il sera trop tard. Il est déjà trop tard.
Ils ont pourtant bien tenté d’alerter, depuis plus de 2 ans, sur l’effondrement de la planète et du vivant. Mais on ne leur a porté qu’une oreille distraite, un rien méprisante et paternaliste. « Ils ne savent pas ce qu’ils disent, ils sont manipulés. Ils sont juste impatients. »
Voilà ce que l’on répète à la jeunesse depuis des années quand elle prend la parole (...)
un monde qui se construit sans les jeunes est un monde qui ne leur conviendra pas plus tard. Un monde dans lequel les ex-enfants seront condamnés à survivre selon des règles qu’ils n’ont jamais choisies. Un monde où ne les écoute pas, où l’on minimise et invisibilise leur parole, quand ils crient au secours face au changement climatique, ou hurlent leur désespoir après avoir été agressé, violés, ce que l’on admettra seulement des années plus tard, est un monde où, chacun avec ses traumatismes, on ne peut plus rien changer.
Ce manque d’écoute et de considération, au fond ce mépris, quand on demande à la jeunesse d’aller manifester en Pologne ou d’essayer la dictature pour voir, est terrible quand on est à un âge où l’on se construit encore, où l’on a besoin de certitudes, d’être rassuré en permanence. Et quand tel n’est pas le cas, alors les conséquences sont terribles. Alors des étudiants s’immolent parce que leur précarité, contre laquelle rien n’est fait, n’est plus vivable décemment. Alors une rage et une colère profonde naissent chez la jeunesse, ce qui n’est absolument pas sain et pas normal à cet âge-là.
Alors on voit des enfants pleurer chaque soir. On voit des jeunes tomber dans la dépression profonde. On voit des gamins auparavant peu engagé·es avoir des envies de violence impulsive, tant aucune autre solution ne leur est proposée. On voit des gens se demander le simple intérêt de leur vie sur terre, vous rendez-vous compte de l’horreur de ce genre de réflexions à un âge si jeune ? Vous rendez-vous compte à quel point le système martyrise sa jeunesse ? (...)
Les protagonistes du monde d’après que chacun appelle de ses vœux sont déjà nés : c’est la jeunesse, elle est là, elle attend, et voudrait bien que le monde d’après soit déjà le monde de maintenant. Celui où elle a une place, une voix, une reconnaissance. Celui où elle peut participer à sa construction, car on ne peut renouveler les idées sans renouveler les gens. Celui où tous les âges sont présents, sinon ce n’est pas le monde de tous, mais le monde de certains. Il est urgent aujourd’hui de redonner toute sa place à la jeunesse. De l’écouter, de la soutenir, de porter ses propos, et de lui accorder un intérêt plus important qu’une simple considération de façade.
« Laissez les enfants rêver. Ne les cassez pas d’avance. Donnez-leur au moins la chance, d’apprendre un jour à voler » disait Anne Sylvestre. Ce jour est là, il faut sauver le monde, il faut nous sauver, alors sauvons les enfants d’abord.