
Au fil des semaines la presse internationale révèle l’ampleur des dérives de l’espionnage américain. Un jour, on découvre avec stupeur que l’Agence de sécurité nationale américaine (NSA) surveillait les communications de 35 chefs d’État dont certains depuis près d’une dizaine d’années. Un autre qu’elle intercepte en masse les données GSM sur le sol même de ses alliés et à leur insu. Un troisième qu’elle infiltre les serveurs de Google, Yahoo et de la plupart des géants du Web, faisant fi des libertés fondamentales de millions de personnes y compris dans les démocraties les plus matures. Un quatrième qu’elle surveille et cherche à pénétrer les emprises diplomatiques de ses partenaires.
liste de pratiques scandaleuses qui semble sans fin et dont on peut se demander si elles ont été vraiment ordonnées par les plus hauts responsables de la Maison Blanche et endossées par les commissions compétentes du Congrès.
Face à l’ampleur des informations mises à jour, la NSA est sommée de s’expliquer. Cependant, elle cherche à se dédouaner de la plus étrange des manières. Son patron, le général K. Alexander nie des pratiques pourtant avérées. Il relativise le caractère liberticide de certains modes d’action au nom de la lutte anti-terroriste, sans apporter pour autant de preuves tangibles de l’efficacité des moyens mobilisés. Plus étonnamment, il s’emploie à souligner le manque de contrôle démocratique des services de renseignement chez certains des partenaires des États-Unis qui expliquerait la "surprise" d’opinions publiques tout simplement "mal informées" des pratiques de leurs propres gouvernements. Plus stupéfiant encore, le général Alexander, à la tête de la NSA depuis 8 ans, n’hésite pas à rendre public les coopérations secrètes avec les services de renseignement de pays tiers, ce qui est pour le moins contre tous les usages diplomatiques.
Dans ce contexte, on se trouve dans une situation pour le moins incongrue. Non seulement, la NSA est responsable des compromissions de l’un de ses anciens employés mais voici maintenant que son directeur révèle lui même l’existence d’accords secrets inter-étatiques. Or les services spéciaux ont besoin de travailler en confiance avec leurs homologues. Si les données de leurs échanges (nature, volume) sont révélées par ceux là même qui en bénéficient légitimement alors les États-Unis prennent le risque de se couper durablement de sources de première main pour leur sécurité. Certes, ils disposent de moyens techniques incommensurables mais Washington, en de nombreux points de la planète, a besoin du soutien de ses alliés les plus proches, à commencer par la France comme on a pu le voir récemment en Afrique du nord et au Sahel ou encore en Afghanistan au début des années 2000.
Non seulement la stratégie de la NSA pour se dédouaner des polémiques nées des révélations d’E. Snowden est dangereuse pour la sécurité des États-Unis et des pays occidentaux mais elle altère l’image des services de renseignement à travers le monde comme outil encadré des politiques publiques. Elle nourrit le stéréotype barbouzard des services spéciaux. Bref en un mot, les réponses apportées par la NSA à sa mise en cause sont irresponsables. (...)