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Si vous saviez, vous nous signaleriez ?
Article mis en ligne le 15 octobre 2019

Le président de la République a appelé les citoyens à surveiller les « signaux faibles » de la radicalisation islamiste. Mais ces signaux sont loin de permettre de reconnaître d’éventuels terroristes. Pire : ils englobent et stigmatisent des millions de musulmans en France qui pratiquent leur religion de façon apaisée. Trois cents d’entre eux, des inconnus, ont décidé de signer une tribune dans laquelle ils se déclarent « détenteurs de signaux faibles ».

Nous sommes des femmes et des hommes qui pouvons être considérés comme des musulmans pratiquants. Des détenteurs de signaux faibles. Cette pratique peut se traduire de plusieurs manières différentes mais elle a en commun d’être prégnante dans notre quotidien.

Ainsi, nous prenons soin de vérifier ce que nous mangeons. Si vous nous voyez souvent manger du poisson ou des plats végétariens à la cantine, ce n’est pas parce que nous prenons particulièrement soin de notre ligne. Si vous nous faites la réflexion, peut-être que certains et certaines répondront pudiquement que c’est parce qu’ils sont végétariens. Si nous trinquons au jus d’orange, cela n’a rien à voir avec une quelconque abstinence thérapeutique. Il est possible d’ailleurs qu’en arrivant à une soirée ou à un buffet, nous nous assurions qu’il y a bien des softs et que nous prenions soin d’éviter le collègue ou l’ami qui voudra à tout prix nous servir une coupe de champagne. Parce que « une seule c’est rien ».

Il se peut que nous ayons été élevés par des parents non musulmans, non pratiquants ou non croyants. Mais il se peut aussi que nous ayons été élevés par un père barbu qui ne peut imaginer se coucher sans avoir accompli ses cinq prières quotidiennes à la mosquée. Il se peut qu’il nous ait transmis ce rituel. Il se peut aussi que notre mère soit une femme voilée qui préfère écouter des récitations du Coran plutôt que la radio. Il se peut que tous deux ne soient pas très à l’aise avec le fait de faire la bise à quelqu’un du sexe opposé. Il se peut qu’ils nous aient inscrits à des cours de langue arabe et d’apprentissage du Coran à tel point que nous en connaissons par cœur quelques pages. Il se peut que, comme eux, nous ayons décidé de vivre notre foi en étant voilée, en étant barbu. Il se peut aussi que nous n’ayons pas fait ces choix-là. (...)

Nous sommes votre collègue, votre ami, votre supérieur hiérarchique, votre employé, votre voisin. Vous nous croisez en faisant vos courses, dans des réunions de quartier, au sein d’associations, lors de sorties scolaires, dans vos clubs sportifs. Tel est notre quotidien dont nous parlons rarement car ces pratiques, quotidiennes, si elles sont visibles relèvent de l’intime. Des pratiques qui demain, pourraient nous incriminer ?

La vraie question c’est maintenant que vous le savez, vous nous signaleriez ?