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Mediapart
Sous la mer Méditerranée : l’incendie couve
#rechauffementclimatique #Mediterranée #biodiversité
Article mis en ligne le 16 juillet 2023

Gorgones et coraux brûlés, espèces envahissantes, pressions de l’activité humaine : la mer Méditerranée, habitat de près d’un quart de la biodiversité marine mondiale, est en surchauffe. Un bouleversement silencieux qui en annonce d’autres.

La cause principale de cette hécatombe est la température de l’eau. « Les gorgones vivent dans des eaux froides. Quelques semaines dans une eau à plus de 25 degrés les affaiblissent considérablement. Au-dessus de 28 °C, quelques jours seulement suffisent pour qu’elles succombent », précise Tristan Estaque. Longtemps, la baie de Marseille, avec ses eaux plus froides que le reste de la Méditerranée (notamment grâce au mistral), a constitué un refuge idéal pour les gorgones rouges. Seulement, l’été 2022 a balayé toutes les certitudes. Ici, la température de l’eau a parfois dépassé les 30 °C. « En août 2022, même à 40 mètres de profondeur, la température de l’eau est montée jusqu’à 26 °C », détaille Tristan Estaque.

Depuis les années 1980, un réseau scientifique appelé T-MEDNet s’est mis en place afin de coordonner des relevés de température aux quatre coins de la Méditerranée. Conclusion : la température de surface (entre 0 et 100 mètres) augmente. Et celle des eaux profondes aussi. De l’ordre de quelques dixièmes de degré depuis les années 1950. Doucement mais sûrement. Mer fermée par essence, la Méditerranée se réchauffe deux à trois fois plus vite que n’importe quel océan sur Terre. (...)

La Méditerranée, future mer tropicale ?

Un désastre écologique que les plongeurs sont forcés d’observer, impuissants. D’autant que les gorgones ne risquent pas de réapparaître dans les prochaines années. Leurs polypes, ces minuscules tentacules bruns qui habillent leurs branches et leur donnent leurs couleurs, poussent d’un à deux centimètres par an, maximum. Si les températures de la mer redescendent, ce qui paraît peu probable au vu des trajectoires climatiques actuelles, il faudrait plusieurs décennies pour que ces gorgones repoussent. (...)

Le péril sur les gorgones n’est que le signal de changements plus importants. « Elles sont un lieu de chasse et d’habitat de beaucoup d’espèces, c’est un lieu de vie sous-marin très important », détaille Olivier Bianchimani, directeur de Septentrion Environnement. « Leur disparition risque d’entraîner un bouleversement des écosystèmes », ajoute-t-il. D’autant que d’autres espèces, moins visibles, subissent le même phénomène : le corail rouge, les éponges et les anémones brûlent aussi. « C’est tout un écosystème coralligène qui disparaît peu à peu. Un peu comme si des forêts d’arbres centenaires partaient en fumée », complète Joaquim Garrabou. (...)

si la gorgone ne résiste pas aux eaux chaudes, certaines espèces s’y font très bien. Le barracuda, originaire du sud de la Méditerranée, a par exemple vu sa population fortement augmenter ces dernières années. (...)

Au réchauffement en cours, il faut ajouter une autre menace : la prolifération d’espèces envahissantes. (...)

Problème, ces espèces sont souvent plus « compétitives » que les espèces locales. Leur prolifération met un peu plus à mal le fragile équilibre de la biodiversité sous-marine. (...)

« La seule et unique solution consiste à faire respecter les accords internationaux visant à limiter le réchauffement climatique. »