(...) Les... porteurs de la crise sillonnent ainsi les pays dits centraux du très vieux continent, en avant-garde peut-être sur les grandes catastrophes du siècle débutant, en... étoiles filantes dans les ténèbres du temps. Les consciences bougent certes, mais alors lentement. (...)
Cependant, et en si peu de temps en Grèce (en quelques jours entre la fin novembre et le début décembre... durant notre “Après la crise ?”), le mémorandum V ou plutôt VI, vient d’être imposé par la Troïka à Antónis Samarás et aux autres marionnettes “hypopolitiques” de la dernière Grèce. Figures de l’impensable qui ne font même plus rire, depuis les pourparlers de Paris fin novembre, et les courriers électroniques et électrochocs des maîtres Troïkans. Tellement l’énormité dépasse alors et de loin, l’hybris.
Entre ses autres “mesures”... donc en ligne d’adoption, figurent : l’augmentation de certains taux de TVA, l’abolition finale des (derniers) droits syndicaux. Et enfin, le prolongement (20 ans d’annuités au lieu de 15 auparavant) de la période minimale quant aux cotisations exigées. Ainsi, les... vaillants natifs de l’après 1975 (scission calendaire... annoncée), perdront même l’espoir de se voir octroyer une retraite dite de base (une sorte de RMI - vieillesse). Rien que par un tel... siècle de chômage (pratiquement 60% chez les jeunes), même un ministrion de Samarás a admis publiquement lors d’une émission de télévision, qu’en réalité, cela signifie tout simplement pour les... ultimes jeunes du pays, qu’ils ne deviendront jamais, les (pauvres) retraités de demain. (...)
Yórgos Vichas, cardiologue et fondateur en 2011 de la Clinique Solidaire Métropolitaine à Ellinikón près d’Athènes, présent et intervenant très suivi au MuCEM lors du Temps fort sur la Grèce, vient d’alerter (3 décembre) sur la situation d’un enfant de deux ans et demi, lequel ne peut pas être opéré d’urgence car ses parents au chômage sont exclus du système de santé et comme l’hôpital exige d’eux le versement d’une certaine somme introuvable, c’est une vie de plus qui risque d’être perdue. (...)
Théoriquement, une loi datant d’il y a six mois, rendrait possible une telle prise en charge des... déportés du système de santé (un quart de la population), à condition que la décision soit ainsi prise et validée par un comité médical dit composé (entre praticiens de différentes spécialisations), ce dernier serait mis en place dans chaque hôpital, or, ces comités n’ont pas été formés pour l’instant.
C’est alors en se rendant au MuCEM qu’avec Yorgos, nous perçûmes les nombreux sans-abris avant bien évidemment, le marché du poisson ou les guirlandes de Noël, déjà. Puis, et contrairement à certains autres intervenants, nous avons publiquement exprimé notre idée s’agissant de la mise en place d’une Cour pénale internationale (déjà celle de La Haye en a été saisie), pour juger les présumés criminels, responsables de cette politique de la mise à mort délibérée, plus précisément et dans le désordre, certains politiciens incontournables d’Athènes, de Bruxelles et d’ailleurs, pour ne pas les nommer. Une prise de position laquelle a provoqué certaines réactions parfois contradictoires chez certains autres intervenants et autant au sein public qui assistait à nos débats. (...)
cette tyrannie, dont le seul but est le profit et l’accumulation permanente, nous impose une vision et un schéma de vie chaotiques, précaires, sans pitié et inexplicable”.
“Et cette vision de la vie est encore plus proche de la vision du monde légendaire de notre gamin de 10 ans que la vie à l’époque où les premiers films de Chaplin ont été tournés”, comme l’écrit le romancier, poète, peintre et critique d’art anglais John Berger,
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“L’étendue de ce qui apparaît comme inexplicable augmente de jour en jour. Le suffrage universel a perdu tout sens, car le discours des politiciens nationaux n’a plus aucun rapport avec ce qu’ils font ou peuvent faire. Toutes les décisions fondamentales qui affectent le monde d’aujourd’hui sont prises par des spéculateurs financiers et leurs agences, anonymes et sans voix. Comme le présumait le gamin de 10 ans, ‘les mots manquent pour désigner ou expliquer le cours quotidien des ennuis, des besoins non satisfaits et du désir frustré’”. (...)
Les mots manquent parfois pour désigner ou expliquer le cours quotidien des ennuis et la France de cet automne du centenaire de la Grande guerre du siècle précédant, fait figure d’un pays décidément... socialement automnal. Mendiants omniprésents, personnes dormant dans la rue ou sur les quais du métro, telle est l’image que l’on retient du pays, en plus de celle d’une... normalité encore entretenue.
Les salaires et les retraites sont versés, et les... participants économiques de se préparer pour les fêtes, les cadres parleront encore et toujours de leurs prochaines vacances tandis... que les exclus ne sont plus autant... volatils que par le passé. (...)
Dans ce même désordre nouveau des affaires courantes et potentiellement généralisables, des journalistes, si souvent fervents habitués des débats parfois retransmis lors de certaines émissions radiophoniques, ces journalistes donc, éprouvent des difficultés grandissantes... à garantir leur sémiotique de la novlangue, imposée comme on sait par les oligarques qui nous gouvernent. À ce propos, j’ai remarqué qu’un certain public français supporte alors de moins en moins l’omniprésence d’un tel jargon, c’est si évident. (...)
On remarquera aussi que le camp européiste n’est guère rassuré... et encore moins rassurant, lorsqu’il préconise l’ultime accélération souhaitable du processus d’anéantissement des derniers bastions des souverainetés populaires et nationales, donc démocratiques ; même si nos démocraties sont à... placer entre... énormes guillemets et cela, depuis un long moment, pour ne pas dire depuis l’avènement de notre modernité et l’épuisement progressif de l’espace public. (...)
les prochaines élections auront sans doute lieu mais plus pour très longtemps. Les élites comptent bien introduire une forme de suffrage censitaire, lié aux revenus et donc, au rang social. Il y aurait comme un horizon de temps clos ; à la manière d’un univers concentrationnaire et de ce point de vue, on peut dire que le terme de ‘survie’ est de retour, déjà en Europe du sud. Un horizon de temps immanquablement privé... voire privatif. (...)
“Je crois que même la science, qui jusqu’ici passait pour l’un des principaux moyens de faire advenir une vision du monde plus rationnelle, plus réaliste, apparaît dans notre vie quotidienne comme une succession de miracles technologiques qui font que tout devient possible. Dans un monde où tout est possible, en un sens rien ne l’est. Et puis, les frontières entre le moi et le monde environnant tendent à se brouiller de plus en plus.”, (“La Culture de l’égoïsme”. Christopher Lasch et Cornelius Castoriadis,
Climats, 2012).
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Dans ce même sens, la “Nouvelle Révolution française” ne sera que techno-numérique, comme le suggère une publicité de saison dans le métro parisien. Personne n’y prête l’attention suffisante, son message est pourtant perceptible : aucune autre politique ne sera plus possible, dans un monde où tout semble possible, rien ne l’est, politique alors comprise. Et celui-ci aussi, pour une raison déjà évoquée : les frontières entre le moi et le monde environnant tendent à se brouiller de plus en plus, d’où peut-être également, une première explication, certes incomplète de la passivité ambiante. (...)