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Sur CNews, toutes les raisons sont bonnes pour justifier les violences policières
/ Samuel Gontier
Article mis en ligne le 20 janvier 2020

La fatigue, les crachats, les vidéos, La France insoumise, les droits-de-l’hommistes, la stigmatisation… Pour Laurence Ferrari et ses experts, les explications aux “dérapages” des forces de l’ordre sont nombreuses. Il ne faut donc pas blâmer les policiers mais au contraire les encourager à réprimer plus.

« On a vu tout au long du week-end un certain nombre de vidéos qui montraient des dérapages. » C’est juste des « dérapages ». Lundi 13 janvier, comme le ministre de l’Intérieur et comme tous les médias, Laurence Ferrari aborde sur CNews la question des violences policières… sans jamais prononcer l’expression, peut-être parce que ministres et députés de la majoriré (Sibeth Ndiaye, Laurent Nuñez, Gabriel Attal, Bruno Bonnell, etc.) ont rappelé qu’elles n’existaient pas dans un État de droit. « Mais il y a aussi cette réalité qu’il ne faut pas oublier, ajoute la présentatrice. Les policiers sont des cibles aujourd’hui dans notre pays. » Il est donc normal qu’ils se défendent. (...)

Même Jean-Claude Dassier l’admet : « On a vu un ou deux dérapages depuis quelques semaines… » Disons entre un et deux, et non les dizaines qu’ont documenté les douteuses vidéos postées sur les fâcheux réseaux sociaux. « Dans ce cas, l’IGPN est saisie, ça me paraît logique. » Et elle classe les affaires, c’est logique. « Avec la violence qu’on voit tous les samedis de gens qui ne viennent pas manifester et qui viennent en réalité pour casser du flic ou casser des boutiques… Dans cette situation-là, je soutiens les forces de l’ordre. » Les violences policières, c’est la faute des manifestants. « La peau d’un flic ne vaut plus un rond en France. Dans les années 1950, il y avait le respect de l’uniforme parce qu’on savait que ça coûtait cher. Aujourd’hui, ça ne coûte plus aussi cher. » La voilà, la solution : rétablir la peine de mort pour les tueurs de policiers. Et l’on reviendrait au bon temps des années 1950.
(...)

« On va voir une autre séquence où on voit des policiers se faire cracher dessus, insiste Laurence Ferrari. Parce que ça aussi il faut le dire, il faut pas le passer sous silence. » Certainement pas. Combien de mains arrachées, d’yeux crevés par les crachats de manifestants ? « On a juste là, à l’image, la séquence où on voit les manifestants venir cracher sur les policiers. » En réalité, un seul manifestant crache (de très loin et en boucle) sur un policier. « C’est i-nad-mi-ssible ! » Et ça justifie les violences policières. (...)

« Certains comportements ne sont pas non plus corrects », poursuit la présentatrice en lançant la vidéo toulousaine du « croche-pied magistral » d’un policier à une jeune femme. « Ce n’est pas acceptable », admet Yves Lefebvre… avant de nuancer : « Il faut toujours contextualiser… Y a pas de blessure… » Donc ça ne compte pas. « … Qu’est-ce qu’ils ont subi avant ? » Ce croche-patte était peut-être nécessaire. « Ce ne sont pas des robots, ce ne sont pas des surhommes, renchérit Gabrielle Cluzel, du site d’extrême-droite Boulevard Voltaire. On cible cette personne qui fait ce croche-pied détestable, il faudrait aussi cibler les personnes qui leur crachent dessus. » Avec des lanceurs de LBD. « Je peux comprendre qu’à partir d’un certain moment de tension, il se passe des choses détestables mais, à ce moment-là, que le camp d’en face soit visé de la même façon. » Avec des grenades GLI-F4, pas avec des croche-pattes.

« Quarante-cinq jours de grève, rappelle Jean-Claude Dassier, y a pas beaucoup de pays au monde qui subissent une telle épreuve, avec les black blocs qui viennent en rajouter… » « Il y a une grande indulgence généralisée avec ces black blocs », appuie Gabrielle Cluzel. Et pas assez de mutilés. (...)

« Encore une fois, soutient comme la veille Laurence Ferrari, les policiers à bout, épuisés par des semaines et des semaines de mobilisations, sont parfois un peu débordés par leurs émotions. » Et voilà, il sont épuisés alors ils tuent ou mutilent sous le coup de l’émotion. La communicante Rose Ameziane renchérit : « J’avais entendu une phrase très juste d’un policier : “Je peux résister douze heures mais je peux pas résister treize mois.” Cet effet de lassitude, il est réel. » Je propose que soit établi un délai légal de deux mois entre chaque manifestation pour que nos policiers puissent se reposer. (...)

Jean Garrigues, l’historien officiel de la Macronie, soutient à son tour que les violences policières sont causées par les manifestants : « Y a une montée de la tension et tout un discours de la société y compris d’acteurs politiques qui ont hystérisé notre rapport à la police. On a assisté à une montée du discours de justification de la violence, pour justifier la violence des Gilets jaunes. » Revoilà la France insoumise et les associations droits-de-l’hommistes. « Y a des bavures mais pas plus qu’à d’autres époques. Il faut se souvenir de la mort de Malik Oussekine. » « Lors d’une manifestation, rappelle Laurence Ferrari. Y a pas eu de mort dans les manifestations de ces derniers mois. » Et Zineb Redouane à Marseille ? Et Steve à Nantes ? Pour une journaliste, Laurence Ferrari n’est pas très bien renseignée (...)

Comme Emmanuel Macron a parlé de « déontologie », même BFMTV et Olivier Truchot doivent se résoudre à poser la question : « Y a-t-il un problème avec notre police ? » Le plateau est beaucoup plus équilibré que celui de CNews puisqu’y figurent Anne-Sophie Simpère, d’Amnesty International, et Noam Anouar, du syndicat Vigi Police qui, contrairement à ses collègues, ne nie pas les violences policières et demande : « Que fait l’IGPN ? » Il trouve même à ces violences une explication particulièrement subversive : « Politiquement, ça s’explique, l’ensemble du gouvernement ne tient que grâce à l’action de la police. » (...)

Sur LCI, David Pujadas se saisit aussi du sujet. « D’abord, les faits, de quelles violences parle-t-on ? Que disent les chiffres, est-ce que cette série traduit une hausse des violences policières ? », demande-t-il à une journaliste. « Alors, on n’a pas de chiffres qui permettent de l’affirmer de manière incontestable. Il existe un décompte réalisé par le journaliste militant engagé contre les violences policières David Dufresne. » David Dufresne, « journaliste militant engagé contre les violences policières » ? Mais alors, tous les autres, tous ceux que je vois sur tous les plateaux, ce sont des « journalistes militants engagés pour les violences policières » ?