Bandeau
mcInform@ctions
Travail de fourmi, effet papillon...
Descriptif du site
Acrimed
Sur France inter, plutôt le Front national que le Front populaire
Article mis en ligne le 8 août 2016

Service public ou service après-vente de l’extrême-droite ?

Pendant l’été, les auditeurs de France inter peuvent, chaque midi, écouter « Le débat de midi », émission de près d’une heure animée par Thomas Chavineau. Les thèmes sont variés : « Obama a-t-il fait un bon président ? » (4 juillet) ; « Comment vivre avec la menace terroriste ? » (15 juillet) ; « La bisexualité est-elle passée dans les mœurs ? » (19 juillet) ; « Le Brexit peut-il sauver l’Europe ? » (20 juillet) ; etc. Pour chaque thème, l’émission reçoit plusieurs invités : journalistes, universitaires, responsables politiques ou associatifs, etc.

Ce lundi 8 août 2016, l’intitulé du « Débat de midi » était le suivant : « Que reste-t-il du Front populaire ? ». Quatre invités : François Reynaert (journaliste à L’Obs), Nicole Masson (historienne), Jean Vigreux (historien) et… Florian Philippot ! (...)

Le vice-président du Front national est donc le seul responsable politique invité à l’occasion d’une émission qui se propose de répondre à la question suivante [1] : « L’esprit du Front populaire anime-t-il toujours la vie politique française ? ». L’espace d’un instant, nous avons cru à une mauvaise plaisanterie. Car si nous ne sommes pas de ceux qui pensent qu’il faut bannir le Front national des antennes, y compris celles du service public [2], inviter un représentant de l’extrême-droite pour évoquer la mémoire et l’héritage du Front populaire est pour le moins surprenant, pour ne pas dire ahurissant.

Est-ce parce qu’aucun responsable politique de gauche, ou du Parti socialiste, n’était disponible ? Nous nous permettons d’en douter. (...)

Seule hypothèse crédible à nos yeux : certains journalistes du service public radiophonique ont attrapé un méchant coup de soleil.

Nous n’avons pas été les seuls à relever cette incongruité, et nombre d’internautes ont fait part de leur stupéfaction, voire de leur colère. (...)

cette invitation n’est malheureusement pas un incident, et participe d’un phénomène que nous avons déjà eu l’occasion d’analyser [3] : la légitimation, par les grands médias, des discours et postures du FN, ici celle consistant à se poser comme le seul parti défendant réellement les intérêts du « peuple », quitte à surfer sur la confusion idéologique en se revendiquant d’intellectuels ou de dirigeants politiques n’ayant rien à voir, de près ou de loin, avec l’extrême-droite.

Car Thomas Chavineau, loin de contester cette posture, tend à lui apporter du crédit, en citant par exemple un tract du FN affirmant que « Léon Blum voterait Front national », ainsi que les fréquentes références à Jaurès chez plusieurs dirigeants frontistes. Tout juste évoquera-t-il timidement « une stratégie de communication évidente » de la part du FN, tout en laissant Florian Philippot développer tranquillement son discours consistant à se poser en héritier du Front populaire [4]. (...)

Post-Scriptum. Nous ne pouvons nous empêcher de signaler ce lapsus du journaliste de France inter : « Est-ce que vous pensez sérieusement Florian Philippot que Léon Blum aurait voté le Front populaire… le Front euh… le Front national ? » Confusion, quand tu nous tiens…