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Mediapart
Syrie : après le tremblement de terre, l’ONU sous le feu des critiques
#seisme #turquie #syrie #ONU
Article mis en ligne le 2 mars 2023
dernière modification le 1er mars 2023

Des dizaines d’ONG syriennes d’aide humanitaire demandent l’ouverture d’une enquête sur l’action des Nations unies qui, selon elles, ont dramatiquement échoué à répondre à la crise subie par le nord-ouest de la Syrie après le tremblement de terre du 6 février 2023.

(...) Des voix appelant à remédier à la situation catastrophique laissée par le tremblement de terre survenu en Turquie et en Syrie se font aujourd’hui entendre, mêlées à celles des milliers de personnes, parfois des familles entières, piégées sous les décombres de leur maison, attendant l’arrivée des équipes de secours. Cependant, la plupart des personnes bloquées n’ont pas eu la chance de survivre, notamment en Syrie, où les équipes de l’organisation non gouvernementale (ONG) de la défense civile les Casques blancs ont travaillé sans relâche pendant neuf jours lors de la phase de sauvetage des personnes qui pouvaient être atteintes.

Les ONG syriennes d’aide humanitaire attribuent la responsabilité de la mort sous les décombres de milliers de personnes à l’incapacité des Nations unies à répondre à la crise qui a frappé le pays de manière soudaine et imprévue, après presque douze ans de bombardements continus par le régime de Damas et son alliée, la Russie, qui ont rendu le défi du redressement presque impossible. (...)

« l’aide qui est arrivée n’était pas destinée à répondre à la catastrophe du tremblement de terre mais était une aide ordinaire, qui ne contenait aucun équipement d’extraction pour les victimes sous les décombres, ni ce dont nous avions vraiment besoin » (...)

Selon Raed al-Saleh, le problème ne se limite pas au manque d’assistance de la part des Nations unies, mais vient aussi des menaces implicites proférées lors d’une des réunions auxquelles ont participé toutes les agences des Nations unies et leurs partenaires des ONG syriennes et de la défense civile. Impossible pour lui de mentionner les noms ou les détails de la réunion, afin d’assurer la sécurité des ONG, dont la mention pourrait les amener à perdre les fonds des Nations unies. (...) le rôle d’une organisation de secours serait d’obéir aux ordres de l’ONU, sinon les critiques ou objecteurs seraient exclus. (...)

Mediapart s’est entretenu par téléphone avec une source de haut niveau au sein des Nations unies (...)

« nous n’avons rien pu faire de concret et nous nous sommes sentis honteux. Mais il était clair que les différences politiques et les objectifs dans la région étaient plus importants que de sauver les personnes coincées sous les décombres » (...)

notre source a confirmé que les Nations unies n’ont même pas soumis de demandes de transit vers la Syrie au gouvernement turc au cours des six premiers jours.

L ’ONU a préféré se tourner vers le régime syrien (...)

Toutes les agences ont des partenaires syriens fiables dans la région, mais elles ont choisi de ne pas se déplacer parce qu’elles préféraient travailler à l’intérieur des zones contrôlées par le régime de Damas, qui a refusé pendant des jours de fournir une quelconque assistance aux régions sinistrées contrôlées par l’opposition, dans le nord-ouest du pays.

Dès les premiers jours suivant le séisme, l’ONU s’est empressée de s’adresser directement au régime syrien, par le biais de rencontres directes, avec le président Bachar al-Assad, qualifiées de « réussies » par Martin Griffiths, secrétaire général des Nations unies pour les affaires humanitaires. En outre, le directeur général de l’Organisation mondiale de la santé, Tedros Adhanom Ghebreyesus, a exprimé sa joie lors de la rencontre avec « Son Excellence le président Bachar al-Assad », comme l’a dit le président de l’OMS dans un tweet officiel, désignant dans ces termes le président dictateur qui a tué pendant douze ans des milliers de Syrien·nes.
Une enquête réclamée

Tout cela a provoqué la colère de millions de Syriennes et de Syriens. Et aussi celle de la Syrian Emergency Task Force, une ONG de défense des droits de l’homme qui a toujours assisté aux sessions du Conseil de sécurité de l’ONU. (...)

Dix jours après le tremblement de terre, la Défense civile syrienne, ainsi que de nombreuses autres ONG du pays, ont demandé l’ouverture d’une enquête sur le comportement des Nations unies dans la gestion de la crise dans le nord-ouest de la Syrie, et que les responsables de leur retard dans la réponse soient tenus pour responsables.

La source de l’ONU confirme que la question se pose au sein des Nations unies en raison du rejet par de nombreux employés et fonctionnaires d’une gestion de crise décrite comme « immorale » (...)

la plus grande question reste celle des milliers de personnes qui auraient pu être sauvées si une véritable aide avait été apportée par la communauté internationale dans un pays où la guerre a fait disparaître toutes les ressources nécessaires à la vie.