Fin janvier, 137 pays s’étaient entendus pour aboutir d’ici à la fin 2020 à un accord sur la taxation des multinationales, sous l’égide de l’OCDE.
Les réactions se succèdent après le revirement américain. L’Union européenne (UE), la France et d’autres pays européens condamnent sans ménagement, jeudi 18 juin, la pause annoncée par Washington dans les négociations internationales sur la taxation des géants du numérique, menées sous l’égide de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).
Jeudi après-midi, c’est cette organisation elle-même qui regrette cette décision, appelant à poursuivre les négociations. « Une guerre commerciale, en particulier en ce moment où l’économie mondiale traverse une crise historique, porterait plus encore préjudice à l’économie, à l’emploi et à la confiance », a alerté le secrétaire général de l’OCDE, Angel Gurria, dans une déclaration écrite. (...)
« Tous les pays [participant à ces discussions] devraient rester à la table des négociations visant à parvenir à une solution internationale d’ici à la fin de l’année », a-t-il ajouté. Plus tôt, c’était le commissaire européen aux affaires économiques, Paolo Gentiloni, qui déclarait espérer que la décision américaine ne serait « pas un arrêt définitif ». Si la solution de l’OCDE ne fonctionne pas « cette année, nous avons clairement indiqué que nous présenterons une nouvelle proposition au niveau de l’UE. »
A « quelques centimètres » d’un accord (...)
Un peu plus tôt dans la matinée, le ministre de l’économie et des finances français, Bruno Le Maire, a dénoncé une « provocation » de la part des Etats-Unis : « Je confirme que nous avons reçu, avec mes homologues italien, espagnol et britannique, une lettre du secrétaire au Trésor, Steven Mnuchin, qui nous confirme qu’ils ne veulent pas poursuivre les négociations à l’OCDE sur la taxation digitale », a-t-il affirmé sur France Inter jeudi matin.
« Cette lettre est une provocation », a-t-il déploré, assurant que la France, le Royaume-Uni, l’Italie et l’Espagne avaient d’ores et déjà répondu aux Etats-Unis pour confirmer, dans une lettre, leur volonté d’obtenir « une juste taxation du digital à l’OCDE le plus vite possible ». (...)
La France appliquera une taxe quoi qu’il en soit
« Nous appliquerons quoi qu’il arrive une taxation aux géants du digital en 2020, parce que c’est une question de justice », a-t-il assuré, rappelant que la taxe française « n’avait jamais été retirée, mais simplement suspendue pour quelques mois ». (...)
La France a décidé d’imposer depuis le 1er janvier 2019 une taxe sur les grandes entreprises du numérique à hauteur de 3 % de leur chiffre d’affaires, en attendant l’adoption d’une fiscalité internationale. L’administration Trump a ensuite menacé de surtaxer « jusqu’à 100 % » l’équivalent de 2,4 milliards de dollars de produits français.
Début mai, Bruno Le Maire avait estimé que l’Union européenne devait de nouveau s’emparer du dossier de la taxation des géants du numérique dans la mesure où les travaux engagés à l’OCDE « [marquaient] le pas ».
« Soit les Etats-Unis reviennent sur leur position et on arrive à un accord d’ici la fin de l’année 2020 et c’est la taxation internationale qui s’appliquera (…), soit il n’y a pas d’accord à l’OCDE parce que les Etats-Unis sont le seul pays à bloquer, dans ce cas, on appliquera notre taxe nationale », a réitéré M. Le Maire.