En toute discrétion, à l’heure où les médias sont focalisés sur la campagne présidentielle, la Présidence de l’Assemblée nationale a enregistré le 24 avril, deux jours après le premier tour, une proposition de loi du député UMP des Yvelines Jacques Myard, « visant à limiter les procédures pénales abusives menées par certaines associations ».
Cette loi, qui vise à rendre impossible dans les faits la constitution de partie civile pour les associations anticorruption comme la nôtre dans les affaires politico-financières, attaquerait également frontalement les droits des associations contre le racisme et les victimes de discrimination, contre les violences faites aux femmes et la maltraitance des enfants, des associations de défense des victimes des accidents du travail, de la délinquance routière, de défense de l’environnement, des consommateurs, des contribuables… (articles 2-1 à 2-21 du Code de Procédure Pénale) (...)
Dans le détail, cette proposition de loi prévoit que lorsqu’une plainte simple adressée au Procureur de la République, magistrat dépendant du gouvernement, est classée sans suite par celui-ci, une association n’aurait plus le droit de se porter partie civile si elle le souhaite. Elle devrait demander au même Procureur, qui vient de lui refuser d’ouvrir une information judiciaire, l’autorisation de se constituer partie civile afin qu’une information judiciaire soit ouverte par un Juge d’instruction indépendant… Autant demander à un arbitre qui vient de sortir un carton rouge, dans la minute qui suit, l’autorisation de faire revenir sur le terrain le joueur qu’il a expulsé pour qu’il finisse la partie !
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Quel pays, quelle démocratie nous prépare-t-on si, face aux pouvoirs et aux lobbies en place, les associations de défense des droits des citoyens sont ainsi désarmées pour demander Justice ?
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De quoi ce député cherche-t-il à se protéger, lui et ses collègues UMP et au-delà ?
Dans la période électorale troublée que nous connaissons, que des législateurs puissent ainsi sereinement envisager de s’attaquer à la liberté des associations en dit long sur la démocratie que certains veulent nous préparer en toute discrétion.
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Notons enfin que cette proposition de loi est enregistrée par la Présidence de l’Assemblée nationale dans la semaine qui suit la proposition commune, adressée aux candidats à la Présidentielle (et bientôt proposée pour les législatives), d’Anticor, Transparence International et Sherpa, d’un nouvel article de loi qui autoriserait les associations anticorruption à se porter partie civile dans toute affaire de corruption, ce qui n’est pas le cas actuellement.
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