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Mediapart
« Thérapies de conversion » au Royaume-Uni : une interdiction à tâtons
Article mis en ligne le 14 décembre 2021

Le gouvernement britannique a annoncé en mai dernier son intention d’interdire les « thérapies de conversion », visant à changer une personne LGBT+. Londres a clos vendredi 10 décembre une consultation publique, qui doit l’aider à rédiger un projet de loi au printemps 2022 pour l’Angleterre et le pays de Galles.

(...) « Ils préfèrent défendre les criminels plutôt que les victimes. » Jayne Ozane n’est vraiment pas convaincue par les questions de la consultation publique mise en ligne par le gouvernement britannique le 29 octobre dernier. Ancienne conseillère pour l’égalité auprès du premier ministre, Boris Johnson, de 2019 à mars 2021, Jayne Ozane s’autoproclame « éhontément gay et éhontément chrétienne » sur son site internet personnel.

Mais avant cela, elle a passé près de 15 ans, à partir de 1995, à tenter plusieurs formes de « thérapies de conversion » au sein de milieux religieux anglicans. « Ce furent des années de prières qui me disaient une seule chose : qui je suis n’est pas acceptable. » Ce n’est qu’après plusieurs séjours à l’hôpital, son corps cédant à la pression, et après avoir envisagé le suicide que Jayne Ozane comprend « le bonheur qui se trouve dans le fait d’être amoureuse de quelqu’un et à quel point cet amour est naturel ». Depuis, elle se bat corps et âme contre ces pratiques de conversion. (...)

Sur le site de la consultation, le gouvernement explique que « l’objectif est de rassembler des opinions sur [ses] propositions en vue de l’interdiction de ces pratiques ». En un peu plus de 20 questions, le gouvernement tente de savoir quelle est la ligne qui sépare l’abolition d’une pratique dangereuse et le respect des libertés d’opinion et de religion. Les thérapies d’aversion, qui revêtaient un aspect physique, comme de la violence corporelle ou même le viol dit « correctif », sont déjà illégales au Royaume-Uni, et le gouvernement propose de reconnaître des circonstances aggravantes.

Notion de consentement

Ceux qui choisissent de répondre à la consultation doivent donner environ 30 minutes de leur temps et leur avis sur des sujets aussi précis que les régulations de l’audiovisuel britannique ou encore les efforts consentis par la police et le système judiciaire pour mettre fin aux pratiques de conversion.

Autant de questions qui, selon Jayne, pourraient pousser les participants à abandonner l’exercice à mi-parcours (...)

Sur le site de la consultation, le gouvernement explique que « l’objectif est de rassembler des opinions sur [ses] propositions en vue de l’interdiction de ces pratiques ». En un peu plus de 20 questions, le gouvernement tente de savoir quelle est la ligne qui sépare l’abolition d’une pratique dangereuse et le respect des libertés d’opinion et de religion. Les thérapies d’aversion, qui revêtaient un aspect physique, comme de la violence corporelle ou même le viol dit « correctif », sont déjà illégales au Royaume-Uni, et le gouvernement propose de reconnaître des circonstances aggravantes.
Notion de consentement

Ceux qui choisissent de répondre à la consultation doivent donner environ 30 minutes de leur temps et leur avis sur des sujets aussi précis que les régulations de l’audiovisuel britannique ou encore les efforts consentis par la police et le système judiciaire pour mettre fin aux pratiques de conversion.

Autant de questions qui, selon Jayne, pourraient pousser les participants à abandonner l’exercice à mi-parcours (...)

Les questions de la consultation ne sont pas les mêmes pour les personnes qui ont « eu l’expérience des thérapies de conversion », mais les interrogations sont plutôt pratiques : l’âge auquel ces thérapies ont été entreprises, la personne ou le groupe qui a proposé ce « traitement » ou encore le genre de contexte (religieux, familial ou thérapeutique) dans lequel les séances ont eu lieu.

Selon une étude de 2017 effectuée auprès de 108 000 personnes s’identifiant comme LGBT+ au Royaume-Uni, 5 % se sont vu offrir une aide pour les « guérir » et 2 % ont accepté. Plus de 50 % des groupes qui ont proposé et effectué ces « thérapies » sont religieux.

Mais le gouvernement ne voulant pas enfreindre la liberté religieuse, il a introduit, dans ses propositions, la notion de « consentement » pour les plus de 18 ans. (...)

Début décembre, 500 membres du clergé ont envoyé une lettre ouverte à la ministre pour l’égalité : « Nous ne voulons pas devenir des criminels, mais si le message chrétien devient un crime, nous continuerons à faire notre devoir devant Dieu », y lit-on.

Le gouvernement rétorque que la loi ne vise que ceux qui n’offriraient pas un « soutien impartial ». Selon Mike Freers, « cela devient une thérapie de conversion quand l’intention change et que la personne d’autorité veut changer l’identité d’une personne ou la contraindre à quoi que ce soit ».

Jayne Ozane assure de son côté que l’influence de son milieu fait que le choix n’existe pas. (...)

Certains de ceux qui ont vécu ces tentatives de conversion ne prennent conscience que des années plus tard qu’ils sont passés par ces « thérapies » tellement ces pratiques peuvent être insidieuses. (...)

Les professionnels de la santé mentale eux aussi sont dubitatifs : « On ne peut pas donner son consentement à quelque chose qui est déjà considéré comme abject et coercitif », explique Igi Moon, psychologue et président·e de l’association de praticiens Mou (Memorandum of Understanding) contre les thérapies de conversions. Igi Moon veut que la loi soit écrite de sorte qu’il reste un « espace thérapeutique pour qu’un individu puisse explorer les sentiments, les conflits intérieurs et la détresse qu’il ressent avec un professionnel éthique pour l’aider à accéder à sa propre liberté » (...)