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UE - Les ONG peuvent demander un réexamen des autorisations d’OGM
Article mis en ligne le 21 mars 2018
dernière modification le 20 mars 2018

Dans un arrêt rendu le 14 mars [1], le Tribunal de l’Union européenne a confirmé que les ONG peuvent demander à la Commission européenne un réexamen d’une décision autorisant un OGM, notamment en invoquant les aspects liés à l’évaluation sanitaire des aliments génétiquement modifiés.

Une interprétation favorable aux ONG.

En avril 2015, la Commission européenne autorise l’importation de trois sojas génétiquement modifiés pour l’alimentation humaine et animale [2]. Elle s’appuie pour ce faire sur les avis de l’Autorité européenne de sécurité des aliments (AESA / EFSA) concluant que les sojas génétiquement modifiés sont aussi sûrs que leurs homologues conventionnels du point de vue des effets potentiels sur la santé humaine et animale ou sur l’environnement.

L’organisation non-gouvernementale (ONG) allemande Testbiotech conteste ces décisions d’autorisation et demande à la Commission européenne de les réexaminer, une possibilité prévue par le règlement d’Aarhus [3]. À l’appui de sa demande de réexamen, Testbiotech invoque des arguments liés à l’évaluation sanitaire de ces sojas transgéniques. L’organisation soulève le fait que l’AESA n’a pas établi d’orientations relatives aux effets sur la santé des plantes génétiquement modifiées (PGM) dont le contenu nutritionnel a sensiblement été altéré. Selon l’organisation, l’absence de ces orientations aurait abouti, notamment, à une évaluation des risques nutritionnels inadéquate et à une violation des dispositions portant sur l’étiquetage. Testbiotech souligne aussi que pour les sojas MON 87705 et 305423, les résidus d’herbicides n’ont pas été pris en compte dans l’examen des incidences sur la santé de la consommation d’aliments pour les humains ou les animaux.

En novembre 2015, la Commission européenne rejette la demande de réexamen de Testbiotech. Elle estime qu’elle n’a pas à y répondre car, selon elle, des arguments liés à la santé ne peuvent pas être invoqués dans le cadre d’une demande de réexamen interne telle que prévue dans le règlement Aarhus (voir encadré ci-dessous). Un rejet qui conduit Testbiotech à saisir le Tribunal de l’Union européenne.

Les arguments concernant l’impact des OGM sur la santé relèvent du domaine de l’environnement (...)

Habituellement, le juge interprète la notion de « droit de l’environnement » de manière très large. Mais des arguments liés à la santé relèvent-ils pour autant de ce domaine ? (...)

Le Tribunal explique que la protection de la santé des personnes fait partie des objectifs de la politique de l’Union dans le domaine de l’environnement et que les OGM ne peuvent être mis sur le marché que s’ils ne comportent pas d’effets négatifs sur l’environnement mais aussi sur la santé humaine ou animale. Par conséquent, relève le Tribunal, « l’évaluation des risques en raison de la dissémination potentielle des organismes génétiquement modifiés dans l’environnement naturel dans l’Union n’est qu’un aspect particulier de l’examen des risques environnementaux dans le cadre d’une procédure d’autorisation » [8]. D’ailleurs, le règlement européen qui sert de base à l’adoption des décisions d’autorisation d’aliments génétiquement modifiés (le règlement 1829/2003), contient des dispositions qui contribuent à la poursuite de la protection de la santé humaine et animale dans l’Union.

Le Tribunal insiste sur le fait que les sojas transgéniques « constituaient, lors de leur culture, des éléments modifiés par l’intervention humaine qui étaient en interaction avec l’environnement naturel. Ainsi, les modifications génétiques de ces éléments de l’environnement [9] étaient susceptibles d’avoir des conséquences sur leur valeur nutritionnelle ou de représenter un risque pour la sécurité alimentaire et constituaient donc des questions relevant du droit de l’environnement » au sens du règlement d’Aarhus [10]. En outre, précise le Tribunal, les animaux qui consomment les aliments concernés sont affectés par ceux-ci, et ces animaux constituent eux-mêmes des éléments de l’environnement [11].

Futures demandes de réexamen des autorisations d’OGM ?
La Commission européenne aurait donc dû examiner la demande de réexamen de Testbiotech, juge le Tribunal. La décision par laquelle la Commission l’a rejetée est donc annulée, ce qui signifie que la Commission devra statuer à nouveau sur la demande de réexamen des décisions d’autorisation des trois sojas transgéniques de 2015.

L’arrêt du Tribunal n’a pas d’incidence directe sur la procédure d’évaluation des risques des OGM. Il est néanmoins important pour les ONG car il a pour effet d’étendre la portée de leur droit au réexamen en matière d’OGM. (...)