
Courant avril 2015, quelques mois après l’achèvement du processus d’adoption de "l’opt-out" culture (renationalisation des autorisations) [1], la Commission européenne a fait une nouvelle proposition [2] : permettre aux États membres d’interdire sur leur territoire l’utilisation d’OGM pour l’alimentation humaine ou animale.
Une proposition qui soulève de nombreuses questions quant à sa mise en œuvre pratique [3]. Le processus législatif lié à cette décision, qui s’avère en principe long de plusieurs années, pourrait tourner court tant il fédère contre lui d’opposition. Après l’opposition de ses commissions « Agriculture » et « Environnement », le Parlement européen a, le 28 octobre 2015, rejeté, en plénière, cette proposition de « re-nationaliser » l’interdiction d’OGM dans l’alimentation humaine et animale, suite à une autorisation au niveau européen. En septembre 2015, c’est le Comité économique et social européen (CESE) qui rend un avis défavorable sur ce projet. Le dossier a depuis été confié au Conseil de l’UE, mais son service juridique a rendu, en janvier 2016, un avis également défavorable. Janvier 2018 : la Bulgarie, présidente pour six mois du Conseil, ne mettra pas le sujet à l’ordre du jour… (...)
José Bové, député européen membre de la Commission « agriculture », salue le rejet massif de ce texte qui créera une « pagaille générale » et qui ne répond pas aux différentes attentes sur le dossier OGM : nouvelle évaluation, étiquetage des produits animaux nourris aux OGM, processus d’autorisation plus démocratique.
Le Parlement européen, en plénière, a rejeté, le 28 octobre, à une très forte majorité (577 contre, 75 pour, 38 abstentions), la proposition de la Commission européenne [8]. Ce vote n’est pas une surprise. En effet, dès juillet 2015, le Parlement européen avait déjà précisé, par voie de presse [9] qu’une « majorité claire » se dessin[ait] au Parlement à l’encontre de ce projet initial. Les eurodéputés soulignent des craintes similaires à celles évoquées par la Commission « environnement ». Au-delà des arguments déjà évoqués, certains eurodéputés estiment que cette proposition ne vise au final qu’à « garantir une procédure d’autorisation plus rapide » sans s’attaquer aux problèmes réels, notamment de reformer la procédure d’autorisation, comme l’avait laissé entendre Jean-Claude Junker, président de la Commission européenne, lors de son arrivée en fonction.
Les euro-députés attendent donc de la Commission européenne une nouvelle proposition. Problème pour cette dernière, ce projet est à prendre ou à laisser. (...)
Nouveaux désaveux : le service juridique du Conseil de l’UE doute de sa faisabilité
Après le Parlement européen, c’est désormais au Conseil de l’UE de se prononcer sur le projet de texte. Au cours des débats, une majorité d’États membres s’est exprimée avec force contre le projet, et a demandé une évaluation juridique et économique de sa faisabilité. Dans sa note, publiée le 19 janvier, le service juridique estime que la base juridique retenue pour la mise en œuvre de ce projet ne correspond pas à ses objectifs [16].
Surtout, le service juridique estime qu’il existe « un doute sérieux » sur la compatibilité de la proposition de la Commission européenne avec les règles du fonctionnement du marché intérieur et de celles de l’OMC. (...)