
Le ministère de l’intérieur a demandé aux FAI de bloquer l’accès au site d’information islamique Islamic-News.info, accusé de faire l’apologie du terrorisme. Comme le permet la loi depuis fin 2014, le site a été censuré sans aucune forme de procès, sans que son illégalité pourtant contestable soit confirmée par un juge indépendant.
Son illégalité supposée est au minimum un sujet de débat, mais il n’a été tranché que dans les bureaux du ministère de l’intérieur. Faisant application de la loi anti-terrorisme de novembre 2014, qui autorise le blocage de sites internet sur simple décision policière, l’Etat français a obtenu le blocage du site d’informations Islamic-News.info, auquel l’accès est désormais impossible en France lorsque l’internaute utilise le serveur DNS de son fournisseur d’accès à internet. La loi fait obligation aux FAI de bloquer dans les 24 heures tous les sites dont il reçoivent la liste, sans qu’un juge en ait vérifié l’illégalité. (...)
"Nous considérons qu’il est de notre droit de dénoncer la manipulation, même lorsqu’elle concerne des organisations classées comme « terroristes » à l’image d’Al-Qaeda, de l’Etat islamique ou des Frères musulmans", ajoute Islamic-News, qui prévient que "le fait de réfuter des affirmations s’attaquant à ces organisations ne peut en aucune manière signifier une adhésion de notre part à celles-ci ni même faire la promotion de leurs idées et actes".
Visiblement le ministère de l’intérieur en a jugé autrement dans sa grande sagesse, aussi et surtout par intérêt politique et stratégique. Le gouvernement s’est officiellement lancé dans une campagne de contre-propagande, dont la censure de l’adversaire ou de ses soutiens réels ou supposés est une arme à part entière. Il ne veut pas laisser passer des discours qui pourraient être repris par des djihadistes en puissance, même s’il ne s’agit pas d’appels explicites à passer à l’action violente contre la France ou ses alliés. Encore une fois, c’est le potentiel anti-démocratique du blocage qui pose question, la France ne faisant pas ici la démonstration d’un grand respect de la liberté d’expression et des droits de la défense. Le site a été censuré sans procès équitable, et sans préavis, alors-même que son contenu ne semble pas à première vue être d’une violence et d’une illégalité incontestable. (...)
Sur Facebook, Islamic News continue à exister sans aucune censure, ce qui ne conforte pas l’hypothèse d’un site d’apologie incontestable du terrorisme. Le réseau social a fortement durci sa propre censure des discours djihadistes, mais a visiblement choisi de ne pas sévir contre Islamic News, qui utilise principalement sa page pour dénoncer "les terroristes kurdes de l’YPG", "les milices chiites contre les sunnites", ou "l’entité sioniste". Des points de vue évidemment controversés, mais qui doivent être entendus dans une démocratie qui se revendique comme telle, et se laisse la possibilité d’entendre et contre-dire toutes les opinions. (...)