
Depuis le 8 juin, une « zone autonome » a été établie en plein coeur de Seattle, dans le sillage du mouvement contre le racisme et les violences policières qui touche les États-Unis suite au meurtre de George Floyd. Alors que ce 20 juin des informations font état de la mort d’un Afro-Américain de trente ans tué par balles à l’intérieur de la CHAZ, nous publions un entretien avec Gwenola Ricordeau qui s’est rendue sur place et a répondu à nos questions : elle décrit le fonctionnement de la zone, sa composition sociale, les activités et discussions politiques qui s’y déroulent.
Tu es allée quelques jours à la CHAZ de Seattle… Peux-tu d’abord nous expliquer ce qu’est la CHAZ ?
Oui ! Seattle est à une douzaine d’heures de route de là où j’habite, en Californie. Je suis arrivée samedi 13 et je suis repartie lundi 15. Je ne suis donc pas restée très longtemps, mais j’ai essayé de discuter avec un maximum de personnes et de me joindre, autant que possible, aux activités politiques en cours.
La CHAZ (Capitol Hill Autonomous Zone) est, comme son nom l’indique, dans le quartier de « Capitol Hill », dans le centre de Seattle. C’est un quartier LGBTQ, où les activités culturelles et alternatives sont nombreuses, et qui est très fréquenté par la population étudiante de la ville.
La CHAZ comprend plusieurs pâtés de maisons et un parc, le Cal Anderson Park (carte). Aux entrées, il y a des barricades tenues généralement par quelques personnes. À l’intérieur de la zone, certains commerces sont encore ouverts, d’autres sont fermés et barricadés.
Quand et comment la CHAZ a-t-elle été créée ? (...)
Les policiers ont abandonné le commissariat : il n’est pas occupé, mais il est fermé et a été rebaptisé « People Precinct ». Son entrée (où figure un gigantesque poster d’Angela Davis) est devenue un mémorial aux victimes des crimes policiers, avec beaucoup de fleurs et de bougies…
Depuis le 13 juin, la CHAZ a été rebaptisée CHOP (Capitol Hill Occupational Protest). L’abandon de l’expression « zone autonome » (qui fait référence aux « Zones Autonomes Temporaires » et aux « Zones À Défendre ») ne fait pas l’unanimité. Il a été justifié par certaines personnes comme un moyen de souligner que les luttent continuent…
Concrètement, comment se présente la CHAZ/CHOP ?
Il y a d’un côté plusieurs bouts de rue dans lesquelles il y a des tentes (et parfois des générateurs) sur les trottoirs, avec notamment un service de soins médicaux et la « no cop co-op » (« coopérative sans flic ») où sont distribués librement de la nourriture, des boissons et des produits de première nécessité. C’est dans cet espace qu’il y a le « conversation corner » (« coin pour discuter ») où on peut venir à tout moment discuter, notamment sur des thèmes établis. Pas loin de là, il y a souvent quelques tables de presse avec des zines ou des réseaux d’échanges de livres qui sont présents. (...)