
Rien n’est plus contraire à la réalité vécue par les peuples que le discours convenu des institutions européennes et des gouvernements de cette Union européenne au service des marchés et des marchands. Ce n’est pas une communauté de valeurs, ce n’est qu’une communauté d’intérêts. Et encore, à géométrie variable, selon les circonstances. Elle n’a pas pour but d’unir les peuples, mais de les mettre en concurrence.
Ce cri n’est pas le réquisitoire d’un eurosceptique. C’est le constat désolé d’un citoyen aspirant à une Europe fondée sur les valeurs des Lumières, au premier rang desquelles se trouve la souveraineté populaire, à une Europe harmonisant ses législations fiscales pour être en mesure d’harmoniser ses politiques sociales en vue d’atteindre le plus haut dénominateur commun, à une Europe en capacité de relever les défis écologiques de notre temps sans se laisser dévoyer par les lobbies de l’agro-business, de la pharmacie, de la chimie, du pétrole, de l’automobile ou de l’atome. (...)
Après l’Acte unique européen (1986), puis le traité des Maastricht (1992), ceux d’Amsterdam (1987) et de Nice (2000), après la transcription du traité constitutionnel en traité de Lisbonne (2008), voici adoptés, en 2012, le MES et le TSCG qui, comme les traités précédents, ont augmenté, mais cette fois dramatiquement, les pouvoirs d’institutions qui échappent à tout contrôle démocratique : la Commission européenne, la Banque centrale et la Cour de Justice. Nous venons de vivre l’acte V du démantèlement démocratique et social des acquis arrachés tout au long des deux derniers siècles. La droite reprend ce qu’elle fut autrefois contrainte de concéder.
A chacune des étapes, la famille politique qui se réclame du socialisme démocratique a renoncé à marquer sa différence, à résister. (...)
Qui ne voit que, dans le monde tel il est aujourd’hui, soumis à la mondialisation néo-libérale, négociée et décidée par tous nos gouvernements, le niveau pertinent pour la résistance et la riposte est le niveau européen ? Que le repli national, c’est encore et toujours ce réflexe Maginot de ceux qui sont toujours en retard d’une guerre. Et qu’il y a nécessité et urgence à construire un front des peuples d’Europe, à dépasser ces frontières dans lesquelles le patronat nous enferme pour mieux nous imposer ces décisions par la voie de la supranationalité. (...)
Surmonter les barrières qui font obstacle à la création d’un front des peuples d’Europe. Barrières culturelles d’abord, qui font que beaucoup pensent encore qu’un problème européen ou mondial peut être réglé lorsqu’il vient à être posé au niveau national. Alors qu’à ce stade-là, c’est trop tard. Barrière linguistique ensuite qui freine l’indispensable dialogue entre peuples. Alors que le patronat, lui, ne s’arrête pas à un tel obstacle. Barrière financière enfin qui plombe les mobilisations par des impératifs de coût. Mais ne sommes-nous pas des militants, prêts à tout donner pour une cause aussi essentielle ?
Qui prendra l’initiative ?